28 mars 2011

Frix For Free


" Ne dites pas du mal du rire. Il n'y a que les hommes qui rient. Le rire est une chose humaine, une vertu qui n'appartient qu'aux hommes, et que Dieu, peut-être, leur a donné pour les consoler d'être intelligent."

Une marche innocente, un coup d'oeil aux vitrines du marchand de disques, une pochette atypique, un prix alléchant, un petit label indépendant. En regardant attentivement la composition du groupe, on dirait du Jazz.

Il en faut parfois peu pour acheter un disque.

Une fois rentré chez moi, je me précipite vers mon avaleur de CD pour découvrir ce qui se cache derrière ce bel emballage "imprimé à de l'atelier de sérigraphie associatif l'encrage à Caen" (c'est ce qui est marqué mot pour mot...).
Première chanson. 
                           The Show Was Not Good.
                                                             Ça commence par des petites notes de clavier, assez enfantines. Les autres suivent peu à peu. Puis un son électronique sorti d'on ne sait où fait son apparition. Et là on comprend de quoi il s'agit. C'est du jazz certes, mais enrichi de pleins de trucs bizarres, parfois dissonants, mais toujours cohérents avec l'ensemble : des voix directement sorties de radios des années 50 (Acromegalia), des samplers tous plus étranges les uns que les autres (Sex Toy), un petit discours sur le rire joliement intercalé sur la musique (Fripo)... Les deux saxophonistes s'en donnent à coeur joie (les autres aussi remarquez), que ce soit lors de soli parfaitement maîtrisés ou complètement délirants. Bref, une branche du free jazz qu'on avait rarement vu jusque là et qui devrait être explorée plus souvent. On parcourt le CD avec un plaisir toujours plus jouissif, alternant les morceaux plus classiques avec ceux qui font la génialitude  (à groupe fou, mot fou) du groupe.
                                      Sans oublier l' excellente reprise Jazz de "I Want You" !

Alors non je ne regrette pas mes deux euros mais oui je regrette que ce soit si peu cher, car caractéristique des choses abandonnées aux bords des marchands de disques, auxquelles on n'accorde pas d'attention sauf miracle local. M'enfin, tant qu'il est sur Tympon, c'est le principal n'est-ce pas ?


20 mars 2011

Cris de saxophone


Un homme est là, seul, se dressant devant un monstre de cuivre. Et se lançant à l'assaut, il arrive à le manœuvrer, tel l'haltérophile soulevant du plomb à bout de bras.Tout commence par le chant des bateaux. Pas de mouettes, on est debout, on observe de toutes nos oreilles. On s'émerveille. Et les percussions viennent ajouter leur grain de sable à la plage. Les baleines font résonner leur chant joyeux. Elles nagent avec la souplesse contradictoire de leurs corps massifs. Les sirènes font entendre leur voix entêtantes. Mais il n'y a toujours qu'un seul instrument, qu'un seul homme sur le rivage.
Changement de décor. Quel monde était-ce? Quelle ville pouvait-ce être? Et les forçats hurlent derrière les barreaux pendant que des farfadets jouent leur musique démente. Il y avait ceux qui ne couraient pas, il y avait ceux qui ne connaissaient que le son de leur propre voix. Qui étaient-ce?
Mais le corniste est-il toujours seul? Il l'est. On n'en revient pas,  on l'observe incrédule. Il transpire et se bat. C'est un difficile rodéo contre un instrument qui n'avait jamais vraiment été dompté. Lui, il y arrive. L'issue est heureuse, on souffle, et on l'entend faire de même, bruyamment, dans quelques-uns de ses vingt microphones.


15 mars 2011

Ethymologie introspective


Tympon c'est comme Tympan, c'est avec les oreilles, mais c'est Tympon. C'est comme Tapons, avec les doigts sur des touches, mais c'est Tympon. C'est comme Tintin le reporter, qui part à l'aventure journalistique, sans trop réfléchir, mais c'est Tympon. C'est comme le Pimpon de la sirène des pompiers, c'est bruyant et plein de couleurs, mais c'est Tympon. Tympon. Tympon.

Alors ça veut dire quoi Tympon ? 

Sur Tympon. On peut tymponer. C'est comme tamponner un document de son cachet, de sa vision, mais c'est tymponer. C'est comme syphoner un grand réservoir d'éléments noyés dans la masse, mais c'est tymponer. C'est comme tambouiller un joli plat de mots, de sons, mais c'est tymponer. C'est comme téléphoner en communiquant un savoir, racontant une histoire, mais c'est tymponer.

Alors ça parle de Musique.

Musique comme signifié, signifiant et référent.
Musique comme objets formés de sons, méta-concept méta-physique méta-réel.
Musique  comme vibrations de l'air que perçoivent nos tympans, notre corps en son entier.
Musique comme art, technique précise, savoir-faire, artisanat, passe-temps, hobby, labeur, création production, produit commercial, marchand et marchandisé.
Musique comme muse, source d'émotions, sensations, vibrations internes et non plus seulement externes.
Musique comme souvenir ancien, élément de la synesthésie, sens, eventail de sens tant abstrait que physique.
Musique comme porteuse d'horizons inconnus, manifestation mystique, d'épiphénomène à phénomène central de l'existence.

Ce qui passe dans les ascenseurs, sur le quai de la gare, au moment où le reveil sonne.

Celle que raconte les Légendaires Dirigeables, dans leur Rock'nd'Roll.
Celle dont m'a parlée le voisin, ce matin, alors que j'allais chercher mon courrier.
Celle que j'ai découverte, par un hasard impromptu, sur les rouleaux de la toile, ou au coin de la rue.
Celle  pour qui certain d'entre nous sont prêts à dépenser des milliards.
Celle qui trône sur le sommet de notre bibliothèque, dans les carton poussiéreux du grenier ou derrière la vitrine des musées.
Celle qui agitent ses mécanismes mystérieux devant notre nez.
Celle qui nous vous leur parle.

Alors quand on tympone, c'est la musique qui parle.
Alors elle parle musicalement.

Du mimèsis, pour imiter, palier la différence entre mots et notes, pour réunir les deux choses.
De l'ekphrasis, pour retranscrire, montrer qu'il y a littérature et musique, en même temps.
Du poésis, pour créer des tableaux de pixels colorés et rompre l'incapacité de produire de la musique avec les instruments usuels.
Du diégésis, pour raconter ce qui se passe en un milieu précis, sur la galette, dans l'oreille et le coeur.
De jeuis, pour s'amuser. Sinon on s'ennuie. Sinon c'est une torturis ridiculis.

Alors Tympon, ca veut dire tymponer, ça veut dire souffler dans un pipeau, ou déposer des coussins péteurs sous nos fesses endolories. Pour que l'épaisseur, le caractère moelleux, apaise nos derrières. Et que le bruit fulgurant du pet réveille les endormis.

9 mars 2011

Itadakimasu

" ITADAKIMASU ( le u ne se prononce pas) célèbre la fusion de la musique 8bit et des plaisirs culinaires pour un concert évènement. Écouter un chiptune en dégustant quelques cookies.... Le rêve de tout vrai otaku digne de ce nom. "



Ce qu'il y a dans le plus grand village de France, c'est qu'une belle soirée a tendance à rassembler tout individu dont la tranche d'âge est comprise entre pinte et girafe. Il y a eu une soirée la veille, toute la coqueluche du coin était là. Il y en a une ce soir, plus grosse, plus joyeuse, plus colorée. Nous nous y retrouverons. Il parait que dès 18h, alors qu'ils installaient le matériel, l'eau écossaise se mélangeait déjà au soda américain. Quand ils ont mangé, ils étaient déjà pleins. J'arrive plus tard, après les premiers sons.

En rentrant, on nous offre un bon pour télécharger une compile gratuitement. Si cela ne l'avait pas ruiné, l'organisateur aurait voulu distribuer des CD plutôt que des promesses virtuelles. Le prix est excessif. Un triangle d'euro pour un octaèdre musical, c'est tout de même gonflé. Anti croissance du PIB, anti-commercial, anti-liberal. Totalement honteux. Pour beaucoup de locaux, c'est le bar des premiers émois. Où il suffit d'avoir soif pour que le videur se trompe sur l'âge minimal. Régulièrement le patron se fait virer par la police, un autre le remplace, et utilise le même filtre. Les tables, le sol, le plafond, tout est pégueux. Ou collant, pour les touristes. L'eau n'est pas chère, mais je suis sans papiers ni ferrailles. Heureusement j'ai des amis, qui en ce joli paysage, ne peuvent qu'être généreux. Pour l'instant, ce n'est pas plein. Mais ça va l'être, ça va déborder. Tant l'affiche est belle, tant l'évènement est populaire. A gauche de la scène, des vidéos sont projetées. Une danse d'images colorées, pour faire fuir les épileptiques. Il y a toute sorte de machines, branchés à d'autres machines. L'une, petite, est dans la main du performeur. Il appuie sur quelques boutons, et le son surgit. Un son ludique, jovial. Un son qui fait remonté les joies de l'enfance. Des son simples et stupides, suivit d'autres sons encore plus stupide, dansent, sautillent, gambadillent dans l'oreille. Des légers problèmes logistiques interrompent parfois l'avalanche de zygomatique électronique. Mais on est content. On bouge nos orteils. J'aperçois mon pizzaiolo. C'est un séducteur solitaire, qui arpente les soirées dans le but de faucher des sexes. Normalement, il va en boite de nuit. Mais ce soir, il est là.  C'est qu'il a du sentir que ce soir, c'est ici qu'il se passe quelquechose. Mais nous ne sommes pas en boîte de nuit non plus. Il ne trouvera pas exactement l'ambiance bourgeoise qu'il recherche, et repartira. C'est que, le Gameboy ne constitue pas un topos de virilité. C'est que, les filles habillés en écolière doivent quand même payer l'entrée. Ça commence à déborder de carbone sur pattes. Un reporter photo libère les oiseaux en cage. Le machiniste change d'instrument. C'est la première fois qu'il utilise une NES. J'espère que ça n'est pas la dernière. Avec sa manette rectangle, il voltige à la vitesse d'une carapace photonique, et nous avec lui. Sur le seuil, les fumeurs fument. La rue est étroite, l'intimité est conservée.

C'est au tour des super-héros Bas Bikini d'investir le premier plan. Des costumes moulants fluos, des masques, du brouhaha fringuant , des voies déchaînées donnent le ton. Le trio n'est pas forcement au mieux de sa forme. Mais c'est toujours un plaisir. Un gout de bon cookie au chocolat blanc, de gros muffin à la framboise, comme ceux que les super-héroïnes vendent lorsqu'elles ne sauvent pas la vie de nos ouïes.


L'organisateur annonce que la star de la soirée va prendre la suite. Des gens s'engueulent parce que les bousculades ont causées des chutes de gobelets, des arrosages de vestes. L'arrivée du show man espagnol nous rappelle qu'il y a plus important à faire. Il ressemble au plombier italien dessiné sur son tee-shirt jaune solaire. En dehors de la scène, il est détendu, chaleureux. Un fois à l'écran, il gagne en folie, et devient un monstre écraseur d'ennui. . A l'aide de son Gameboy, de ses cris accompagnant la vagues de pixels sonores, il met la foule en mouvement. Parfois, ça s'arrête. Le temps d'une blague, ou d'un repérage. Puis hop, ça repart. C'est un peu comme si il distribuait de ces étoiles jaunes, champignons rouges et blancs, qui donnent un surplus d'énergie. Il lance des boules de feu, il donne des coups de queue. Durant les accalmies, il se change en grenouille, ou en statue de pierre, pour que son pouvoir continue de nous irradier. Il fait mine d'enlever sa salopette sans bretelles, mais retire son short. Un individu louche vient alors lui arracher violemment son haut. Ce n'est pas très gentil. Il est tout nu. Un ver de terre, qui tient un boîtier gris super sonique, et pousse d'étranges cris ludiques. Il y a trente ans en arrière, le leader des Portes avait été fort embêté pour avoir potentiellement montré ses attributs. Ce soir, on voit tout, on s'en fout. Il faut croire qu'au fur et à mesure que l'univers grandit,  notre tolérance aussi. Un blond à la chemise blanche entrouverte se met à danser, à danser sa danse ontologique. La même que celui du dernier clip des Têtes Radio. Mais c'est le demi-borgne rock star qui l'a recopié, et non l'inverse. Lui il danse parce qu'il danse. Ça ne plaît pas à tout le monde. Il subit des lancers de pierres virtuels. Il faut croire que l'univers n'est pas encore assez grand par rapport aux dimensions de la pièce, pour qu'on puisse y être totalement libre. Le chef d'orchestre, à force de sauter de tuyaux joie en tuyaux éclat, a perdu son équilibre. Il  fait trébucher l'enceinte de gauche. Rien de grave, elle a plusieurs vies. Des corps se trémoussent sur les tables. Ça sent bon la transpiration.

Puis le jeune Harry Doux domicile prend la relève. Un anglais magicien à la baguette technologique, en forme de pavé. Au départ c'est un peu sage. L'air ne vibre pas assez. Les lignes nous passent au dessus de la tête, sans agiter nos neurones capillaires. Après beaucoup de bouton, les spasmes commencent à apparaître. L'audience entre en ébullition, se positionne périodiquement à égale distance du sol et du plafond. Hé sale cornichon, t'avais pas dis que tu me payerais un coup ? Dit l'un. Pardon ?! Dit l'autre. Salerpipopipette de trompette t'avais dis que tu me payerais un coup ! Dit l'un à l'autre. Mais je n'ai jamais dis ça, je ne te connais même pas ! Dit l'autre à l'un. POGOOOO ! Crient les uns aux autres. Et l'onde gagne en intensité. Les épaules se touchent en câlins passionnés. Ce qui peut apparaître comme de la violence sauvage aux yeux de peureux, n'en est pas. Si un malchanceux tombe, un cordon de protection se forme inopinément, jusqu'à ce qu'il se relève. Et le terrain de jeu est bien délimité. On s'amuse brutalement, entre gentleman délurés.

Dehors, il y a toujours autant de monde, on rentre et sort librement. Monsieur Pulsion de Sabre joue de l'air guitare. Je me repose sur un lit d'orge et houblon, sans trop y prêter d'attention. Tympon n'est pas toujours au top...

Débarquement des Surfeurs Pixélisés. Monologue d'introduction. Voix grave de conteur portée par des notes en échos. Multiples problèmes de baffles.  Leurs plages sont à moitié huit bit, à moitié six cordes. Idéal pour un surf sur la toile, un beach-volley entre deux formatages. Vague rythmée, pour revenir délicatement au monde réel, en quittant sa console de jeu, abandonnant manettes, boutons et croix directionnelles. Des couples dansent. Des copines aussi. Mais des méchants viennent les embêter. Les cloches sonnent deux coups. L'organisateur nous salut, nous remercie. Après les crédits, on nous indique la sortie.

A l'extérieur il y a les policiers, qui viennent eux aussi nous embêter. Fouillent, reniflent, nous collent aux murs. Nous donnant le sentiment d'être coupable d'un péché post-originel. La sécurité est la première des libertés, selon notre maire. Cela fait toujours un choc. Sortir du monde où les dragons kidnappeurs de princesses finissent dans la lave bouillante alors que les héros sont congratulés. Rentrer dans celui où il est interdit de sauter de niveaux en niveaux, où de dérangeants bugs nous arrêtent à chaque sortie châteaux. Levons le camp. Nous en avons tous bien profité. Mon ami peut-être un peu trop. Il joue à Pong, zig-zag du caniveau aux façades d'immeubles.

C'était un joli jeu, la durée de vie est plus que raisonnable, les environnements sont variés tout en restant cohérents. On est triste, mais satisfait, quand nos paupières viennent clore l'aventure.

GAME OVER

2 mars 2011

Autres choses


Diabologum - #3




Ce n'est pas tant une chronique de disque. Puisque, ce n'est pas tant que ça un disque. Autre chose. Autre chose dans mon expérience de vie. Il y en a quelques uns comme ça, des objets qui rentrent à l'intérieur de soi-même, qui y sont rentrés il y a bien longtemps, et qui depuis ressortent à chacune de nos paroles, de nos prises de positions dans le monde. On en a tous à l'intérieur de nous, de ces joyaux qui nous marque depuis toujours et à jamais. C'en est un. Un bon gros.

Je me rappelle l'écouter sur ma mezzanine, jeune enfant. Je n'y comprenais pas grand chose. Je répétais les mots. De la neige, de la neige, de la neige en été ! A force, ils sont totalement ancrés en moi. Des mots simples, banals. Avec de temps en temps des écarts, des mots savants qui ressortent de la masse, et viennent enfoncer le sens. Je les comprenais, dans le sens trivial du terme, "mettre à l'intérieur". Je ne voyais pas ce que cette œuvre pouvait avoir d'inaccessible, de difficile d'accès. Après tout, ce n'est que des monsieurs qui grattent, qui tapent, qui chantent, qui s'amusent. Alors on l'écoutait entre deux parties de bonshommes plastiques, ou tartines de patte chocolatée.

Puis j'ai grandi, et le monde avec moi. J'ai compris que derrière cette image de neige estivale, il y avait autre chose. Qu'il fallait voir plus grand. Que ça parlait aussi de ce décalage entre ma vision idéaliste, et la réalité concrète. De ce désordre apparent. Des multiples dérèglements qui viennent entraver le rêve. Que le son de guitare gras et bruyants, était un mélange de la fond et du forme. Que ce ciel gris mortuaire, était ce qui m'attendait à la sortie de l'école.

J'écoute. J'écoute. Je vis à gauche à droite et j'y reviens encore. Je continue d'ouvrir les yeux. Le constant se prolonge, creuse, creuse. Ce n'est pas perdu pour tout le monde. Oui, c'est vrai. Il faut en profiter. Pardi, ça c'est bien dit. Et ça ne gâche rien. Il est vrai qu'on s'amuse bien tout de même. Il y a, entre ces nombreuses dissonances, amas boueux, une sorte d'espoir. Quand la guitare vire dans les aigus, c'est bien cela que ça veut dire, que ça implique. Et puis tant qu'on peut jouer aux champions.

Puis ça continue. La voix morne, plate, inexistante. Une voix qui ne chante pas, qui est en perpétuel échec oral et mélodique. Cette manière de partir de faits réels, anodin, pour faire surgir le sens infini. Les guignols de l'info c'est rigolo. Il ne parle de rien, pour parler du rien. La plaine sonore en fond, le bruit qui ne s'arrête pas une seconde. Plus je vois cette pourriture, la remarque, et m'en extrait. Et plus je me sens bon.

Empilement d'années. Rendu par cet empilement de faits. Cette constellation de destins, d'impasses. Alfred trouve que sa vie est devenue trop ennuyeuse. Qui misent bout à bout constituent mon monde intérieur et extérieur. Les samples électroniques qui surgissent. Des explosions. Des sifflements aigus. Des petits bips caverneux. Et cela donne une chanson, cela donne une vie, un point de départ tout comme une destination. Cela donne un itinéraire de promenade, la seule promenade qui nous est possible, et qui devient donc la plus belle, la plus essentielle. A découvrir absolument.

Ça défile un peu plus. On avance dans la déstructuration, dans l'écroulement des certitudes, des croyances. Et ce constat de solitude, d'absurde devient un hymne collectif. Il n'y a rien à gagner ici, à part sortir quand c'est fini, main dans la main, de celle qui nous a choisi. A part chanter, jouer, frayer. A part détruire les murs, à part écouter cette longue ligne de guitare qui me berce, qui se ballade en montagne russe en se reposant sur les roulements de peaux de tambours. A part crier haut et fort, et dépasser, se dépasser, tout dépasser. Il n'y aura rien à gagner ici. A mes oreilles, le sens devient inverse. La rage devient combat actif contre le mal.  Devient appel à aller ailleurs, devient message rassurant quand à la pourriture environnante, que je ne suis plus le seul à percevoir. On passe d'inquiétude à révolution.

Ce n'est pas de l'optimisme creux, de l'espoir bisounours. Il n'y a pas de fin heureuse. C'est autre chose. C'est le mouvement post-tragédie, c'est l'action malgré la paralysie dramatique. On ne peut pas dire, pour eux, ça va bien, eux, ils sont heureux. On ne peut pas dire, c'est parce que j'ai raté le coche, c'est parce que ce n'est pas encore mon tour, que moi je ne surf pas sur la vague, mais bientôt j'emménage dans un château rose en Espagne ... Non. Il n'y a pas de réalité fictive et merveilleuse dans laquelle il est très dur de se reconnaître en temps de chute. C'est un plat morne et triste, où la moindre agonie orale devient acte de puissance. C'est de la pop qui fonctionne même au beau milieu d'un cimetière mondial. C'est un premier pas vers le dépassement de la morosité ambiante.


Puis je pourrais continuer encore longtemps comme ça. Parce que je n'ai pas tout dit, et qu'à vrai dire, je continue à en apprendre. Je pourrais me faire une mauvaise psychanalyse. Partir de cet album pour décrypter tout les symboles qui jonchent ma route. Parler du monologue cinématographique. Parler des autres paysages. Parler des silences. Parler des arc-en-ciels posthumes. Parler de la dissonance harmonique. Parler des mots qui me hantent. Parler. Mais je laisse l'orgue de fin, la musique d'enterrement de notre génération vide faire le boulot de clôture. Et cette voix punk