Un petit chien. Un petit lutin au bonnet blanc. Un vaisseau en forme de conserve spatiale. Un robot qui sommeille. Des bestioles à trompe. Un escargot assoiffé qui martèle sa maison. Des toiles d'araignées. Une mouche. Des coléoptères. Un réfrigérateur débranché. Un petit extraterrestre qui range des poires. Une saucisse pendue. Un gros extraterrestre qui regarde sa télé. Une panne d'essence. Un papillon qui virevolte. Un étrange sage qui demande sa pipe. Des fourmis qui escaladent un arbre. Un putois agressif. Un chauffeur de taxi assoupi. Du café, du rhum, de l'huile de foie de morue. Un lamantin qui dort, d'autres qui volent. Une danse joyeuse autour d'un feu de camp.
16 novembre 2010
14 novembre 2010
Alchimie du Bruit / Cogito Boueux
Ça s'appelle Patience. Patience de quoi ? Depuis quand il
nous faut patienter ? J'en ai marre moi, d'attendre. Attendre
d'enfin savoir ce que j'attends. L'image c'est une grosse tache
marron blanche, un rond de crotte, un point en explosion. Disons une
fleur de boue.
Dead C - Patience
Si on définit la musique comme une expérience, un
passage à travers des vibrations de l'air, alors tout ce
brouhaha est nécessairement lié à une expérience
de vie particulière, à des souvenirs, à des
émotions sommeillant en nous. Tout un tas d'éléments
que la musique récupère, vient remuer, triturer.
Écouter de la musique revient à faire une psychanalyse,
mais une vraie, pas un test de fauteuil. Une opération
chirurgicale systématique, un chamboulement ontologique. Il y
a dix ans, je n'écoutais pas le même type de musique. Il
y a 10 ans, je n'étais pas le même. Mes affects, mes
dispositions à ont changé.
Je me rappelle. Au départ, c'était du punk rock,
tout doux, qui donnait envie de sauter en agitant les bras. Après
je me suis lassé d'écouter des ordres grotesques, sans
aucune profondeur. Et puis on se rend bien compte que dans la vie il
ne suffit pas de sauter en agitant les bras. Ça ne fonctionne
pas. Aller vous trouver un job avec ca. Allez nourrir une famille.
C'est un mensonge. Ils sont tout gentils et ils se font les couilles
en or sur notre dos. Mais on n’est pas invité à la
fête.
Alors je suis passé à autre chose, naturellement. À
ceux qui crient avec moi, ceux qui éventrent les bourgeois assis dans
leurs fauteuils de velours. Ça crache beaucoup. Les structures
sont plus complexes. Mais là encore, ça ne fonctionne
pas. La première fois qu'on entend taper du poing sur la
table, on est confiant. Mais quant à la centième fois,
rien n'a changé, on l'est moins. Les gens sont toujours aussi
sales. Soi-même, on n'est pas sur d'être convenable.
C'est un peu facile d'entonner la révolution sans dépasser
le seuil de sa porte. Ce qui est intéressant, c'est ce qui se
passe entre les cris. Lorsque l'on est passif. Je continue à
grandir. La solitude, le vomi, la tristesse deviennent une routine.
Comme des zones grises prévues d'avance sur le calendrier. Qui
reviennent selon l'éternel retour nietzschéen. Rien de
bien incroyable. Ça arrive à tout le monde, plus ou
moins fréquemment. La société fourmille de
désespérés. Trop facile de se faire passer pour
le plus à plaindre de tous. C'est des conneries. Le commun se
créé dans le constat collectif de son impossibilité.
Tous perdus. Et pourtant on perdure.
J'attends. Mon cœur se remplit par la droite, se vide par la
gauche. C'est vrai, il y en a pour qui tout va bien. Qui ne se
sentent ni aliénés, ni entravés, ni grignotés.
Ceux-là essayent de garder leur inertie. Ne se mettent pas en
contact avec ce qui pourrait les déstabiliser sur leur
envolée. Rien de puissant. Rien de fort. Seulement des
effleurements, afin de ne pas tomber. Je pense malheureusement qu'ils
se trompent. Qu'ils finiront par chuter, nous rejoindre. Qu'ils
finiront par ne plus avancer loin de tout souci. Le choc risque
d'être rude. À force de se vanter d'être un
funambule au dessus de la boue, de chier sur les crapauds, on se fait
avoir. Par un pieu, un bovin tombé du ciel, un naufrage
intempestif, un mauvais lancé de dés.
Je n'ai plus d'inertie. Je n'ai plus d'illusions. Parfois j'ai des
sursauts. Je sais les utiliser à bon escient. Je sais m'en
servir pour être constructif, avancer. Puis de nouveau, rien.
Du sur place.
Voilà ce que c'est que cette musique. Du sur place. Du
vide. De l'absence. Elle ne vous demande rien. Ni de sauter en
l'air, ni de crier. Ce n'est pas de la musique faite par des
individus extérieurs, qui vivraient dans le meilleur des
mondes et qui nous en passeraient gentiment un bout. C'est de la
musique faite par et pour nous. Nous qui ne comprenons pas les rouages. Qui
avons perdus depuis longtemps le manuel. Qui en avons marre de lancer
les dés, de suivre des règles absurdes qu'on nous
impose sans aucune légitimité. Nous qui sommes seuls
devant l'écran. Avec l'envie que quelque chose de réel
se passe. Qu'on arrête de se foutre de notre gueule en nous
prenant par des pincettes, pour mieux nous jeter parmi les ordures sans se salir les mains.
Nous qui avons saisi le pluralisme dans toute son étendue,
c'est-à-dire seulement qu'une partie. Ça suffit les
machines stupides qui ont plus de droits que nous. Ça suffit
l'harmonie que tout le monde suit sans que cela ne nous conduise
nulle part. Cette musique n'est pas un placebo. Ce n'est pas une
marchandise vendue ayant pour but de nous donner l'illusion
d'avancer. Cette musique n'est rien. C'est ce que l'on porte avec
nous. Ce que l'on peut poser sur la bibliothèque. Parce
qu'elle y restera. Le bruit, c'est ce qu'il y a avant la musique.
C'est ce qui témoigne le mieux notre impuissance de la
formuler clairement. C'est ce qui ne demande aucun effort. Pas besoin
d'aiguiser ses tympans, de les saupoudrer de fond de teint, de les
préparer à une réception grandiose. Non. Elle
fait le boulot à notre place. Elle se glisse vulgairement dans
notre être, notre existence. Toute proche. Elle est avec nous mêmes lorsque
nous sommes parti. Avec Je.
C'est pour ça que je l'aime. Parce que qu'elle est toujours
là, toujours accessible. Elle ne va jamais se balader autre
part qu'en moi. Elle ne me parle pas de choses qui me dépassent,
ne se permet pas de critiquer mon incompétence,mon ignorance.
Je peux m'y reposer. J'ai totalement confiance en elle. Mon inquiétude
disparait. Et à partir de là, de cette base solide, de
cette espèce de cogito boueux, je peux repartir.
Aller un peu plus loin qu'avant. En sachant qu'elle amortira ma
chute, qu'elle ne m'abandonnera pas sur le bord d'une mélodie d'autoroute, d'une harmonie de palais. Que ce n'est pas une illusion. Que je suis bien vivant, même
noyé dans la boue. Plus d'artifices, plus de mensonges. Plus
de contes héroïques alors que moi je suis cloitré
dans mon donjon solitaire. L'espoir se crée dans la boue. La
vie se conçoit en sous-sol. Le soi-disant progrès qu'on
nous vend tous les jours est une fumisterie. Je retourne à
l'âge primaire. Quitte le banquet de la beauté, la folie
dionysiaque, pour rentrer chez moi et me reposer, enfin.
À l'image de la dernière chanson. Le meilleur des
mondes, ce n'est pas lorsqu'il y a un paradis dans les nuages, mais
lorsque même l'Enfer devient Amour.
11 novembre 2010
Timbre de boix
Timber Timbre
Pour accompagner un jour férié. Pour remplir le ciel bleu au dehors, le plafond blanc en intérieur. Pour précéder la bouilloire qui s'apprête à chanter, car l'eau du thé est prête. Pour parler au chat qui pétrit le canapé bleu du salon. Pour pardonner aux papiers qui tombent doucement du bureau. Pour agrémenter le pot de beurre de cacahuètes presque vide, celui de spéculos encore bien en forme. Pour remercier mon ami lointain qui m'a montré cette jolie voie. Pour nager dans sa grande baignoire océanique. Pour ressentir la glace crémeuse et grumeleuse, qui fond dans le palais. Pour comprendre les hauts palmiers dont les feuilles semblent se coucher en compagnie des nuages. Pour célébrer la simplicité, la beauté du gâteau au yaourt. Pour couvrir les ronflements de ma Mamie. Pour se préparer à retourner au travail. Pour s'en satisfaire. Pour s'en foutre.
2 novembre 2010
Contes des Filles de la Ville du Soleil II
Grotto Of Miracles / Midnight Cowboys From Ipanema
C'était en 1986, avec la Grotte aux Miracles, et les Cowboys Nocturnes d'Ipanama. C'était un CD inconnu distribué au hasard par les membres du groupes et une cassette absurde qui a finalement été promue au laser, quinze ans plus tard. Symbole de l'ouverture infinie du trio, le spectacle s'ouvre sur une reprise d'un des hits de la radio de Tanger. Puis on trouve sur un hymne dépressif, très simple, presque vide, mais oh combien puissant, sur un différent type de putain. Et les miracles se succèdent, du jazzy pour lesbienne, du swing pour rois, un air de muezzin version rock. Toujours cette touche orientale, cet attrait de l'ailleurs, comme on peut aussi le percevoir dans la poésie rimbaldienne, les contes nocturnes, ou les envies de jeunes bourgeois. Il y a aussi un long et obscure monologue, accompagné de quelques accords à la cithare, qui tentent de percer le mystère de la mort. Construction sonore qui apparaitre souvent, tout au long de la discographie. Et qui s'accorde très bien avec la folie ambiante, le mysticisme omniprésent, la quête d'une immanence transcendantale. Quand les cowboys font leur entrée, ce n'est plus du tout la même chose. Chaque galette est différente de la précédente, et il est très difficile de suivre la progression si on se cloisonne à une vision précise. Là, nous avons à faire à trois branquignoles en possession d'un enregistreur cassette, avec plusieurs idées farfelues en têtes. Certaines sont commencées puis abandonnées, d'autre sont jouées jusqu'au bout, de manière plus ou moins stupide. Et entre ce bruit, les trois amis se parlent, dissertent sur des bêtises. Un road song en béquilles. Pour le plaisir de jouer de la musique, pour la beauté des vibrations de l'air, pour les chameaux et les armées de spermes. Et un peu pour nous, quand même.
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