22 décembre 2011

Zorya



Tomas Dvorak. Souvenez vous. Il revient avec son deuxième (vrai) album sous son pseudonyme Floex. Alors même si la forme change (ce n'est pas une BO de jeu vidéo), le fond reste intact. Des sons envoûtants mêlés les uns aux autres pour former un tout du plus bel effet mélodique. Le piano qui ouvre cette magnifique épopée apaise notre esprit pour le rendre plus vulnérable aux futurs effets qui vont se rajouter au fur et à mesure de la progression du morceau. Une formidable introduction qui plonge l'auditeur dans le monde de Zorya. Un monde qui ressemble à un brouillard épais mais douillet, flou mais réconfortant. Il suffit juste de se laisser faire par la musique pour en apprécier toute la qualité. On est porté par tous ces éclats sonores qui virevoltent à droite à gauche. Les espaces entre chaque morceau permettent de digérer ce qu'on vient d'entendre, de contempler le monde que l'ont vient de franchir. Et aussitôt, nous voilà repartis dans un nouvel univers. Très semblable au premier, avec toujours cette sensation de bien-être ensorcelant, mais qui possède néanmoins sa propre identité, évitant ainsi un éventuel sentiment de lassitude qui pourrait gâcher tout ce beau spectacle. Des créatures humaines viennent même parfois prêter leurs voix à ce fantastique orchestre.
 

10 décembre 2011

Nouvelle tentative de noisissure

NOISE

Substantif féminin.                                                 C'est de la musique, c'est une musique.

Peut-être que ça vient du latin nausea, mal de mer, envie de vomir.
Parfois nous avons la nausée
il faudrait se sortir de cela
s'y confronter entièrement
et le dépasser à toute vitesse
Et puis en provençal, chagrin, affliction, ennui.
Parfois nous nous ennuyons
molle réalité sans enjeu
alors l'ivresse sonore
c'est de la vie servie sur un plateau
Ce qui donne en français, querelle, bruit, tumulte, tapage, dispute
Une dispute en musique
du bruit pour couvrir le bruit
du tapage dans les neurones
c'est l'harmonie qui nous tend le poing

Alors on dit,
Chercher (des) noise(s) à quelqu'un (à propos de quelque chose). Chercher querelle à quelqu'un. Quereller.

Comme on pourrait dire,
Chercher noise aux conservateurs réactionnaires vieux cons classiques.
Chercher des noises aux âmes sensibles effrayés par la puissance du monde.
A propos des limites du réel, des freins létaux, de ce qui nous retient prisonnier.
Chercher querelle à soi même, ennuyant ennuyeux ennuyé.
Quereller tout ce qui est là, pour accueillir l’ailleurs.

Et il y en a qui disent,
Hardi, querelleur, cherchant noise; c'est un drôle qui n'a pas peur, tout prêt à faire feu sur les bleus (Courier, Pamphlets politique, 1819 )

Parce que le chercheur de noise est un querelleur. En avant, il canarde ses jugements, ses sensations, son équilibre. Il tombe, il meurt, il s’autodétruit.

C'est moins tapageur, moins élégant, moins beau, Mais non moins agaçant; Ce grand chercheur de noise se présente aujourd'hui d'une façon bourgeoise
(Barbier, Satires, 1865)

Parce que c'est sur, c'est à la mode, la nouvelle bourgeoisie musicale, branché underground hipster bobo.

Et puis parfois c'est mauvais, ça cherche noise pour noisettes, ça susciter querelle pour un rien .

Mais quand ça parle, fort et là où il faut. Alors oui, et encore oui, et même non pour s'amuser.

Soyons querelleurs, soyons chercheurs de noise !

27 novembre 2011

Modernité



Ça fait 5 ans, me dit le disquaire du coin. 5 ans que ça recommence, que les monsieur lambda bêta et gamma sont rentrés dans le jeu. Ça fonctionne. Comme des petits pains. C'est bon les petits pains.

Personnellement, j'ai mis du temps à comprendre. Quelque jours avant l'illumination, je faisais encore une énième erreur. C'est que, pour que cela devienne une évidence, il faut pouvoir ressentir le résultat, entendre, voir, toucher. Et puis c'est dur à admettre, on voudrait faire l'autruche et continuer dans sa lancée, pour justifier ses centaines d'achats passés. Mais il faut s'y résoudre. Les Flaques, les 3 Mémés Pépés, nos zipouds, nos arc-en-ciels enfermés sur des tranches plastique qu'il faut observer au microscope laser, tout ça c'est de la gnognote. Tout ça c'est du Mickey enfermé dans sa baignoire. Has-been. Ringard. Laissons place au progrès, soyons absolument moderne.
 
VIVE LE VINYLE

Une galette sonore. Une tarte musicale. Une soucoupe bruyante extraterrestre, une succession miniature de montagne, de ravin, la chaine de l'Himalaya en panorama noir. Des toiles d'artistes qui se réjouissent de s'exposer sur votre bibliothèque, ou de danser sur votre platine.
Ca vous réchauffe un salon.
Il y a une face de plus que sur un CD, alors quand c'est finis, on retourne, et ça continue.
Avec un CD, y'a plus qu'à changer.
Il y en a plein dans les vides greniers ou nos propres greniers.
Hello, I Love You est mieux en accéléré
Après on ne peut plus s'en passer.
Ca fait mieux dans un grenier
VIVE LA MODERNITÉ
VIVE LE VINYLE
VIVE LA MACHINE A ÉCRIRE

22 novembre 2011

Un hiver à Jerusalem

" fais théâtre sans pièces. exhibe. les morceaux de la prose du monde"

J'partais voir une chic pièce de théâtre, sur la fragilité du vide et les beautés éphémères, d'un type bien, qui fait pas qu'dire, qui fait un peu aussi (François Tanguy). Puis, partie de la mise en scène quotidienne, j'suis tombée sur un ticket tout frais, un billet express pour une rencontre étonnante...

Vendredi 18 novembre. 19:30. Rennes.
« C'est pour Jerusalem?  Par ici. »
Une nana, pas bien plus grande que 3 pommes, s'incorporait, de tout son réel, de tout son ici, dans les images bien lointaines, d'un avant, d'un ailleurs. 
Elle, au milieu des rayons d'image, elle paraissait en être. Sa voix, pouvait être ici autant que là bas, en Israël...pendant exactement 56 minutes, le même temps que peut durer une de ces opération 
Jerusalem Plomb Durci
la voilà s'esclaffant, saisie de toute part par les contradictions interminables, d'une dictature émotionnelle...
« 6 millions, 6 millions d'enfants juifs sont morts dans les camps »; et chaque année, les plus jeunes célèbrent, la mort et la tristesse,sur cette terre que les anciens sont prêts à bouffer chaque matin pour la souffrir. -  enterrer les cadavres sous les cadavres pour faire place aux prochains.  cadavres.

Ils sont pas beaucoup, deux exactement. Lui – Xavier Klaine - Elle - Ruth Rosenthal. Eux - la WINTER FAMILY. Ils se voyagent pas mal, et s'invitent, dans les églises, les chapelles et les cryptes. C'est là, dans ces lieux aux acoustiques célestes, que commence la messe subversive... Du coup, c'était un peu normal, d'aller à leur concert un dimanche, dans notre église à nous, un bar à Bascule, où la musique hallucinée a déjà fait effondrer quelques murs. Le transport est violent, sucré, feutré...une invitation au voyage sensuel de nos corps en transe... peut être qu'il ne suffit pas de les écouter, mais c'est souvent le cas, sauf musique transgénique, pour comprendre. Enfin, évidemment, ce n'est pas un peut être, le théâtre ne s'écoute pas dans une oreillette, et la musique ne se regarde pas avec des boules quiés.




21 novembre 2011

Dans les Potagers #1

C'est à côté du marché, dans le quartier populaire en voix de gentrification. Il n'y a ni enseigne, ni terrasse officielle. Le linge de la voisine du dessus est pendu au balcon. Un drap blanc coloré de fleurs. Sur les murs du hall, des expos, photos, dessins, peintures, cela change au fil des mois. C'est bien aménagé. Un canapé de cuir marron, exactement deux chaises, et un fauteuil très confortable. Si l'on veut ramener un souvenir, des vinyles posés sur la table basse sont en vente. Il ne reste que peu de la production historique, pressés en faible nombre, ils s'épuisent vite. Il y a aussi le frigo, derrière le comptoir blanc, pour acheter du liquide. On peut y venir seul ou accompagné. Des gens sont là, pas des jambons mais de la chaire vivante. Ça parle musique, concert et dromadaire. Et puis il y a un bon Dj, pour occuper les oreilles avant le début des hostilités. L'heure de la première note est variable, mais quand le public est appelé à descendre, tout le monde s'engouffre dans les escaliers. Sans oublier de jeter son cadavre de verre dans les cadis prévus à cet effet, et de sortir son petit billet pour soutenir les camarades. Un écriteau sur la porte, vous serez mignons de ne pas fumer, merci. On en fait ce que l'on veux. Sur les murs de l'escalier des rats noirs sont dessinés. Et un chat, juste avant la porte d'entrée de la cave. Ce n'est pas très grand, aux concerts gratuits des grosses pointures c'est un peu serré.
Enfin, on y est. Oreilles ouvertes, ceintures libérées. Retour à la terre, en passant par la lune.
Écoutons.




THE BEST AMERICAN BAND!

J'ai toujours rêvé de voir un concert de rock punk dans une cave. Avec un son crépis qui part en miette, une musique qui selon tous les sens de la perception se désagrège, mais se reconstruit quelque part, dans la tête, le sexe, le nombril ou je ne sais où. Partout. L'impression que de la poussière s'envole des peaux du batteur. L'envie de sauter, non par convention sociale, mais par conséquence existentielle, du fait d'être lâché au milieu de cette sauvagerie rocailleuse. Le son juste assez trop fort, comme il faut. Ça tape sans relâche, sèchement, insuffle une énergie, un rythme de débauche. Le chant caverneux, façon homme préhistorique perdu dans les temps modernes. La guitare, au bout de son fil téléphonique, acerbe, cynique, violence là aussi induite par le simple fait d'être là. Un pierrier sec, qui chauffe, qui dégage. Aridité. Le batteur se change en lama, crache à la gueule du vide sa mauvaise bière multinationalisée. Puis redevient cheval des cavernes, au galop, taureaux des champs rocailleux. Un ours à la basse, en un coup de griffe ça te décapite. Ça mange du miel. La ruche est débordante, on en a plein les babines. Le miel que l'on vient d'avaler nous ressort par les oreilles, ça bourdonne, ça transpire, c'est tout cela que l'on entend, sucré, cristallin et grumeleux, c'est la manière dont ça jaillit, Pinocchio auteur d'une energie positive d'auto-destruction. Du larsen maitrisé, saupoudré dans l'ivresse, voilà ce qu'il y a. Voilà ce que c'est.


WOMAN


Ça commence par du bruit, ça finira par du bruit, et entre, nous avons deviné, du bruit aussi, beaucoup de bruit. Bruit invisible qui  dégénère, cancéreux. Y'en a qui s'occupent d'amener le schmilblick vers sa mort pendant que d'autres lui insuffle des nuées au cœurs. On entend le battement du rythme. Alors ca s'etend, ca vie, convenablement avec des excès suffisant, puis ça meurt. En moyenne, 5 secondes de durée de vie. Lent, lourd, ennuyant, chiant à l'impossible, puissant, vivant. C'est du post-truc, c'est du après, ce qui vient après, au suivant, les vieux chnoks sont morts de faim, trop pécunier, trop nombriliste, et maintenant c'est ça. On entend pas la voie, on entend que quelqu'un chante et que nous ne comprenons pas ce qui est dit, et que lui non plus. On en revient toujours à cette volonté de persécuter l'air ambient.

 "Sorry if it's too loud, but it's the only way we know to play"
 " Allright ! "

Un camarade dit que ça s’appelle du Swamp Noise. Avec les alligators qui rodent, les tête coupés, les guirlandes vaudou, le brouillard, le bruit de l'eau qui stagne. C'est surement ça. Un beau paysage américain.


13 novembre 2011

Just a lemon time...

Trois artistes.
                    Trois chansons.
                                             Trois styles.
                                                                 Un thème récurent : le thème du citron.
Je l'appelle comme ça parce qu'il faut bien lui donner un nom.
Les premiers s'inspirent du dernier. Les intermédiaires, on ne sait pas trop.
            Probablement.
                                  Bref. On s'en fout un peu en l'occurrence.

Just enjoy it.

1 août 2011

Jazz in Paris #3 - La revanche



Jamais un batteur n'aura autant attiré l'attention.
(et je ne dis pas ça parce que j'en suis un)

     Par son look déjà. Bien habillé, petit costard avec noeud papillon. Crâne à moitié rasé. Un coté avec des jolis motifs dessinés par la tondeuse. L'autre avec les cheveux rabattus et soigneusement plaqués. Une fine barbe qui parcourt sa mâchoire pour rejoindre sa (fine) moustache.
     Par son attitude. Tirage de langue. Mouvements secs de la tête pour accompagner les coups de baguette. Expressions faciales accompagnant la musique. 
     Par sa technique, même si à ce niveau ce n'est pas ça qui fera réellement la différence. Un jeu extrêmement puissant. Il frappait fort le bougre. On l'entendait bien (trop diront certains). Il a peut-être perdu sa baguette dès le début du concert, mais il n'a jamais perdu le rythme. Il en faisait parfois un poil trop, mais ce n'est certainement pas moi que ça gênera.
     Par son audace. Une chose est sûre : il n'avait pas peur de s'affirmer. C'est lui qui menait la troupe et assurait la structure de la musique (et pas simplement la structure rythmique). Sa façon de jouer et ses riffs extrêmement denses donnait un cachet très particulier aux différentes compositions.

Mais bien évidemment, ce n'est pas parce que je suis en train de louer le talent du batteur qu'il faut oublier les 2 autres membres du groupe (car c'est bel et bien un groupe, avec plusieurs personnes en son sein dont chacune à son importance). Le contrebassiste, et accessoirement "leader" (c'est lui qui parlait entre les chansons), avait des doigts hypnotiques qui parcouraient ces 4 cordes avec frénésie et précision. Le pianiste quant à lui se faisait plus discret mais contribuait fortement à l'ambiance qui se dégageait de chaque chanson. Pas de longues envolées noires et blanches mais surtout des accords bien plaqués et placés.

Bref, un des meilleurs concerts de Jazz qu'il m'ait été donné d'entendre cette année. Phronesis qu'ils s'appelaient. Un nom que je ne suis pas près d'oublier de si tôt (et encore moins avec leur album acheté 2 jours après...).

NB : ce qui est dit dans l'article ne correspond pas forcément à ce que vous entendrez. C'est là qu'est tout la différence entre un concert et un CD (on ne vous le répétera jamais assez).

23 juillet 2011

Fuck Funk Phoque

Funk
Nom masculin invariable
(argot américain signifiant "odeur désagréable")
~
Style de rock noir apparu vers 1970 (James Brown, Sly Stone, Stevie Wonder)



Je n'y connais pas grand chose en Funk.  Larousse non plus d'ailleurs... Je sais simplement que la founke (comme beaucoup disent malgré la définition laroussienne) doit faire bouger tous les membres du corps (cerveau compris). Quand on écoute (ou qu'on joue) du funk, on ne peut pas s'empêcher d'être excité, de se mouvoir de façon à ce que toute cette incroyable énergie musicale émerge de nous et aille contaminer les autres. C'est ça le funk pour moi : de l'énergie à n'en plus finir. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que Dumpstaphunk en a un sacré stock.
Sheez Music donne parfaitement le ton et ne laisse pas une seconde à l'auditeur pour s'asseoir sur son siège et écouter le CD tranquillement. Lève Toi ! Bouge ! Sa reprise est également excellente. Comme Paper Chasing Britney, improbable instrumentale de 8 minutes et 31 secondes et qui arrive à nous captiver de bout en bout. 
     Comme Gasman Chronicles, où clavier, guitare, basses, batterie et voix s'entendent parfaitement pour donner un pur moment de groove comme on en écoute rarement.
             Comme Do Ya, plus classique, compacte et au rythme "saccadé", pour encore mieux nous faire bouger la tête.
                      Comme tout le reste de l'album finalement.
Alors avis à ceux qui s'ennuient, à ceux chez qui il pleut, à ceux qui veulent bouger comme jamais et à tous les autres, votre messie est arrivé.

26 juin 2011

Vibracordages



Parce que c'est un des instruments qui attire le plus de gens. Parce que la vibration des cordes produit des sensations magiques. Parce qu'il y a d'autres choses que ces imbéciles qui jouent les jeux interdits. Parce que certains hexacordistes nous font vibrer plus que quiconque. Parce que c'est la base du rock, l'accompagnement de la chanson, mais aussi un des plus beaux instruments du jazz et du flamenco. Parce qu'elle se décline en mille variétés du petit ukulélé aux objets étranges à trois manches. Parce que tout le monde aime la guitare.
Pour ça et pour mille autres raisons, je voulais parler de notre corps qui s'accorde dans ses vibrations aux cordes qui agitent l'air. Parce qu'on en a tous frôlé les cordes un jour.  Elle peut être électrique, elle peut être sèche, elle peut être amplifiée ou ne pas l'être. Plus que le saxophone, plus que le violon et même plus que la contrebasse, tous ont rêvé de pouvoir la prendre et, le plus simplement du monde, transmettre du rêve autour de soit. Car la simplicité de l'instrument nous fait parfois oublier l'infinité de ses subtilités. La guitare. Allant du vieil engin retrouvé dans le grenier du grand père, aux trois cordes restantes désaccordées à la gratte de rêve du magasin de musique du coin, en passant par les débris de fin de concert de celle de Pete Towshend des Qui. La guitare est un mythe, sans conteste l'instrument du siècle. Que l'on aime où que l'on méprise les effets des guitares électriques, que l'on préfère Georges Brassens ou Jimmy Hendrix, on ne peut pas passer à côté. Alors, par pur plaisir, tympon vous offre sa sélection de musiques sans autre point commun que cet instrument, unique, secondaire, principal ou discret. Pour vous en mettre plein les tympans et pour découvrir des nouvelles choses.



14 mai 2011

Fratrie déconnectée

Je vais vous conter l'épopée de deux frères au bout d'un grand lac. Un oreilliste lointain avec qui j'échangeais des pigeons électroniques me fait soudain part de la venue de deux frères déconnectés le soir même dans une usine. Sans attendre, je mets mon baluchon sur le dos et me rends dans les décombres d'un centre commercial. C'est dans ce lieu en ruine qu'a lieu le prélude: 
Quatre jeunes sans prétentions jouent du rock a un public bariolé au milieu d'une exposition de jeunes artistes. On m'offre une cannette d'orge et des saucisses. Et puis je remets mon baluchon sur le dos. L'autre bout du lac m'attend. Après une courte ellipse, voici l'improbable usine. Je suis le premier, je prends une bière, puis une jolie galette laser auprès des frères Bishop. Tout le monde s'assied devant un écran, à regarder la photo du "handsome stranger". Il y a des tapis par terre, des guitares et deux chaises en dessous de l'écran. Puis le film:
Une multitude d'expérimentations sonores et visuelles. Parfois des musiques. Puis le grand Gocher devant un écran représentant le grand Gocher devant un écran représentant le grand Gocher devant un écran représentant le grand Gocher devant un écran représentant le grand Gocher... Des images. De la nourriture, de tout. Gocher partout. Et les 40 minutes passent telle cueillette d'une fleur. On sort tout perturbés, tout ébahis. Et personne ne va à Lausanne après le concert. Une fille habite dans un grand appart avec pleins de gens. Si vraiment je n'ai pas de train. Mais le concert commence, ils jouent:
Je me dis que je bosse demain, que je n'ai pas le droit d'être en retard. Les musiques s'enchainent, entre poésie guitarresque et histoires de meurtres d'enfants. Et des blagues. Et des cigarettes qu'ils nous invitent à fumer dedans, en s'en donnant eux même à coeur joie. Ils sont contents de pouvoir fumer dedans ce soir. Ont-ils déjà dit qu'ils aimaient fumer? Quelqu'un veut-il annoncer quelque chose? Il a trois minutes. Qui veut, peut. Allez, à votre place on profiterait. Et fumez vous aussi, la police ne viendra pas. Mais personne ne prend la parole. Tant pis, ils chantent en fumant. Toutes sortes de choses, dont des classiques de Sun City Girls. L'heure du train approche. Je suis tiraillé entre une fatigue extrême et mon envie de rester. Je crains de n'arriver à l'heure au travail demain. Je m'enfuis lâchement dans un désolant sentiment de frustration et de honte. Mon voisin de concert m'a adressé des mots compatissants lorsque j'ai du partir prendre mon train. Alors je me console en mettant des musiciens miniatures dans mes oreilles, pour entendre encore une fois les frères déconnectés et leur pote gocher dans le long convoi de métal. Mais je suis heureux tout de même de ce que j'ai eu.
(Je ne vous fait pas écouter, ces gars là ont déjà  été tymponnés à plusieurs reprises)

1 mai 2011

Jazz in Paris #2



On dit souvent que les apparences sont trompeuses, qu'il ne faut pas s'y fier, que l'habit ne fait pas le moine etc. Et bien même dans le Jazz cela s'avère être vrai. Devant nous, 3 musiciens au look très djeun's. Un à la mèche folle, un peu comme un certain gamin de 14 ans que les magnats de la musique s'arrachent. Un autre qui a l'air un poil trop sûr de lui, se forçant parfois à gesticuler sur sa chaise comme pour imiter les plus grands. Bref, à les voir comme ça, il est légitime de se poser quelques questions quant à ce qui va nous parvenir aux oreilles. Mais aussitôt les premières notes jouées, plus rien à redire. Oubliés tous ces préjugés vestimentaires et comportementaux. Seule la musique compte. Et quelle musique ! Du jazz très moderne, très fou, fleurtant parfois avec le free. Le pianiste s'en donne à coeur joie, alternant moments calmes et véritables frénésies auditives. Le batteur sort parfois de son foutoir des bibelots grelottants aux sonorités imprévues. On a l'impression quelques fois qu'ils ont du mal à se trouver mais globalement, l'alchimie entre les 3 fonctionne plutôt pas mal. Après ces 3 sets d'une heure chacun, je ne peux qu'acheter le CD (encore une fois). Ça ne vaudra jamais ce que je viens d'entendre mais que voulez-vous, c'est ça le Jazz...


17 avril 2011

Remarques sociologiques

A une des boucheries de mon quartier, il y a du jazz. Du death metal rappellerait trop l'abattoir. De la pop nous pousserait au végétarisme. Alors à la boucherie, il y a du jazz.

Les soixante-huitards enclin à ramasser les jeunes auto-stoppeurs écoutent Nostalgie. A volume très bas.

Le casque audio est devenu objet de mode. Il y en a aux bordures dorées, aux petites moumoutes de fourrures rose. La musique qui transit par les oreilles n'est pas très importante, elle n'atteint pas les yeux d'autrui.

Dans leurs camions enfumés, les camionneurs écoutent du reggae.

Bien souvent, sur un reportage inintéressant, vide de tout contenu, passant sur une grande chaîne télévisée, on entend quelques morceaux de bravoures de la Constellation canadienne. Paradoxe interne.

Sur les radios de musique classique, il y a peu de publicités aliénantes.

De nos jours, si vous dites Reggae à des unités, ils répondront tous Groundaischieun.

28 mars 2011

Frix For Free


" Ne dites pas du mal du rire. Il n'y a que les hommes qui rient. Le rire est une chose humaine, une vertu qui n'appartient qu'aux hommes, et que Dieu, peut-être, leur a donné pour les consoler d'être intelligent."

Une marche innocente, un coup d'oeil aux vitrines du marchand de disques, une pochette atypique, un prix alléchant, un petit label indépendant. En regardant attentivement la composition du groupe, on dirait du Jazz.

Il en faut parfois peu pour acheter un disque.

Une fois rentré chez moi, je me précipite vers mon avaleur de CD pour découvrir ce qui se cache derrière ce bel emballage "imprimé à de l'atelier de sérigraphie associatif l'encrage à Caen" (c'est ce qui est marqué mot pour mot...).
Première chanson. 
                           The Show Was Not Good.
                                                             Ça commence par des petites notes de clavier, assez enfantines. Les autres suivent peu à peu. Puis un son électronique sorti d'on ne sait où fait son apparition. Et là on comprend de quoi il s'agit. C'est du jazz certes, mais enrichi de pleins de trucs bizarres, parfois dissonants, mais toujours cohérents avec l'ensemble : des voix directement sorties de radios des années 50 (Acromegalia), des samplers tous plus étranges les uns que les autres (Sex Toy), un petit discours sur le rire joliement intercalé sur la musique (Fripo)... Les deux saxophonistes s'en donnent à coeur joie (les autres aussi remarquez), que ce soit lors de soli parfaitement maîtrisés ou complètement délirants. Bref, une branche du free jazz qu'on avait rarement vu jusque là et qui devrait être explorée plus souvent. On parcourt le CD avec un plaisir toujours plus jouissif, alternant les morceaux plus classiques avec ceux qui font la génialitude  (à groupe fou, mot fou) du groupe.
                                      Sans oublier l' excellente reprise Jazz de "I Want You" !

Alors non je ne regrette pas mes deux euros mais oui je regrette que ce soit si peu cher, car caractéristique des choses abandonnées aux bords des marchands de disques, auxquelles on n'accorde pas d'attention sauf miracle local. M'enfin, tant qu'il est sur Tympon, c'est le principal n'est-ce pas ?


20 mars 2011

Cris de saxophone


Un homme est là, seul, se dressant devant un monstre de cuivre. Et se lançant à l'assaut, il arrive à le manœuvrer, tel l'haltérophile soulevant du plomb à bout de bras.Tout commence par le chant des bateaux. Pas de mouettes, on est debout, on observe de toutes nos oreilles. On s'émerveille. Et les percussions viennent ajouter leur grain de sable à la plage. Les baleines font résonner leur chant joyeux. Elles nagent avec la souplesse contradictoire de leurs corps massifs. Les sirènes font entendre leur voix entêtantes. Mais il n'y a toujours qu'un seul instrument, qu'un seul homme sur le rivage.
Changement de décor. Quel monde était-ce? Quelle ville pouvait-ce être? Et les forçats hurlent derrière les barreaux pendant que des farfadets jouent leur musique démente. Il y avait ceux qui ne couraient pas, il y avait ceux qui ne connaissaient que le son de leur propre voix. Qui étaient-ce?
Mais le corniste est-il toujours seul? Il l'est. On n'en revient pas,  on l'observe incrédule. Il transpire et se bat. C'est un difficile rodéo contre un instrument qui n'avait jamais vraiment été dompté. Lui, il y arrive. L'issue est heureuse, on souffle, et on l'entend faire de même, bruyamment, dans quelques-uns de ses vingt microphones.


15 mars 2011

Ethymologie introspective


Tympon c'est comme Tympan, c'est avec les oreilles, mais c'est Tympon. C'est comme Tapons, avec les doigts sur des touches, mais c'est Tympon. C'est comme Tintin le reporter, qui part à l'aventure journalistique, sans trop réfléchir, mais c'est Tympon. C'est comme le Pimpon de la sirène des pompiers, c'est bruyant et plein de couleurs, mais c'est Tympon. Tympon. Tympon.

Alors ça veut dire quoi Tympon ? 

Sur Tympon. On peut tymponer. C'est comme tamponner un document de son cachet, de sa vision, mais c'est tymponer. C'est comme syphoner un grand réservoir d'éléments noyés dans la masse, mais c'est tymponer. C'est comme tambouiller un joli plat de mots, de sons, mais c'est tymponer. C'est comme téléphoner en communiquant un savoir, racontant une histoire, mais c'est tymponer.

Alors ça parle de Musique.

Musique comme signifié, signifiant et référent.
Musique comme objets formés de sons, méta-concept méta-physique méta-réel.
Musique  comme vibrations de l'air que perçoivent nos tympans, notre corps en son entier.
Musique comme art, technique précise, savoir-faire, artisanat, passe-temps, hobby, labeur, création production, produit commercial, marchand et marchandisé.
Musique comme muse, source d'émotions, sensations, vibrations internes et non plus seulement externes.
Musique comme souvenir ancien, élément de la synesthésie, sens, eventail de sens tant abstrait que physique.
Musique comme porteuse d'horizons inconnus, manifestation mystique, d'épiphénomène à phénomène central de l'existence.

Ce qui passe dans les ascenseurs, sur le quai de la gare, au moment où le reveil sonne.

Celle que raconte les Légendaires Dirigeables, dans leur Rock'nd'Roll.
Celle dont m'a parlée le voisin, ce matin, alors que j'allais chercher mon courrier.
Celle que j'ai découverte, par un hasard impromptu, sur les rouleaux de la toile, ou au coin de la rue.
Celle  pour qui certain d'entre nous sont prêts à dépenser des milliards.
Celle qui trône sur le sommet de notre bibliothèque, dans les carton poussiéreux du grenier ou derrière la vitrine des musées.
Celle qui agitent ses mécanismes mystérieux devant notre nez.
Celle qui nous vous leur parle.

Alors quand on tympone, c'est la musique qui parle.
Alors elle parle musicalement.

Du mimèsis, pour imiter, palier la différence entre mots et notes, pour réunir les deux choses.
De l'ekphrasis, pour retranscrire, montrer qu'il y a littérature et musique, en même temps.
Du poésis, pour créer des tableaux de pixels colorés et rompre l'incapacité de produire de la musique avec les instruments usuels.
Du diégésis, pour raconter ce qui se passe en un milieu précis, sur la galette, dans l'oreille et le coeur.
De jeuis, pour s'amuser. Sinon on s'ennuie. Sinon c'est une torturis ridiculis.

Alors Tympon, ca veut dire tymponer, ça veut dire souffler dans un pipeau, ou déposer des coussins péteurs sous nos fesses endolories. Pour que l'épaisseur, le caractère moelleux, apaise nos derrières. Et que le bruit fulgurant du pet réveille les endormis.

9 mars 2011

Itadakimasu

" ITADAKIMASU ( le u ne se prononce pas) célèbre la fusion de la musique 8bit et des plaisirs culinaires pour un concert évènement. Écouter un chiptune en dégustant quelques cookies.... Le rêve de tout vrai otaku digne de ce nom. "



Ce qu'il y a dans le plus grand village de France, c'est qu'une belle soirée a tendance à rassembler tout individu dont la tranche d'âge est comprise entre pinte et girafe. Il y a eu une soirée la veille, toute la coqueluche du coin était là. Il y en a une ce soir, plus grosse, plus joyeuse, plus colorée. Nous nous y retrouverons. Il parait que dès 18h, alors qu'ils installaient le matériel, l'eau écossaise se mélangeait déjà au soda américain. Quand ils ont mangé, ils étaient déjà pleins. J'arrive plus tard, après les premiers sons.

En rentrant, on nous offre un bon pour télécharger une compile gratuitement. Si cela ne l'avait pas ruiné, l'organisateur aurait voulu distribuer des CD plutôt que des promesses virtuelles. Le prix est excessif. Un triangle d'euro pour un octaèdre musical, c'est tout de même gonflé. Anti croissance du PIB, anti-commercial, anti-liberal. Totalement honteux. Pour beaucoup de locaux, c'est le bar des premiers émois. Où il suffit d'avoir soif pour que le videur se trompe sur l'âge minimal. Régulièrement le patron se fait virer par la police, un autre le remplace, et utilise le même filtre. Les tables, le sol, le plafond, tout est pégueux. Ou collant, pour les touristes. L'eau n'est pas chère, mais je suis sans papiers ni ferrailles. Heureusement j'ai des amis, qui en ce joli paysage, ne peuvent qu'être généreux. Pour l'instant, ce n'est pas plein. Mais ça va l'être, ça va déborder. Tant l'affiche est belle, tant l'évènement est populaire. A gauche de la scène, des vidéos sont projetées. Une danse d'images colorées, pour faire fuir les épileptiques. Il y a toute sorte de machines, branchés à d'autres machines. L'une, petite, est dans la main du performeur. Il appuie sur quelques boutons, et le son surgit. Un son ludique, jovial. Un son qui fait remonté les joies de l'enfance. Des son simples et stupides, suivit d'autres sons encore plus stupide, dansent, sautillent, gambadillent dans l'oreille. Des légers problèmes logistiques interrompent parfois l'avalanche de zygomatique électronique. Mais on est content. On bouge nos orteils. J'aperçois mon pizzaiolo. C'est un séducteur solitaire, qui arpente les soirées dans le but de faucher des sexes. Normalement, il va en boite de nuit. Mais ce soir, il est là.  C'est qu'il a du sentir que ce soir, c'est ici qu'il se passe quelquechose. Mais nous ne sommes pas en boîte de nuit non plus. Il ne trouvera pas exactement l'ambiance bourgeoise qu'il recherche, et repartira. C'est que, le Gameboy ne constitue pas un topos de virilité. C'est que, les filles habillés en écolière doivent quand même payer l'entrée. Ça commence à déborder de carbone sur pattes. Un reporter photo libère les oiseaux en cage. Le machiniste change d'instrument. C'est la première fois qu'il utilise une NES. J'espère que ça n'est pas la dernière. Avec sa manette rectangle, il voltige à la vitesse d'une carapace photonique, et nous avec lui. Sur le seuil, les fumeurs fument. La rue est étroite, l'intimité est conservée.

C'est au tour des super-héros Bas Bikini d'investir le premier plan. Des costumes moulants fluos, des masques, du brouhaha fringuant , des voies déchaînées donnent le ton. Le trio n'est pas forcement au mieux de sa forme. Mais c'est toujours un plaisir. Un gout de bon cookie au chocolat blanc, de gros muffin à la framboise, comme ceux que les super-héroïnes vendent lorsqu'elles ne sauvent pas la vie de nos ouïes.


L'organisateur annonce que la star de la soirée va prendre la suite. Des gens s'engueulent parce que les bousculades ont causées des chutes de gobelets, des arrosages de vestes. L'arrivée du show man espagnol nous rappelle qu'il y a plus important à faire. Il ressemble au plombier italien dessiné sur son tee-shirt jaune solaire. En dehors de la scène, il est détendu, chaleureux. Un fois à l'écran, il gagne en folie, et devient un monstre écraseur d'ennui. . A l'aide de son Gameboy, de ses cris accompagnant la vagues de pixels sonores, il met la foule en mouvement. Parfois, ça s'arrête. Le temps d'une blague, ou d'un repérage. Puis hop, ça repart. C'est un peu comme si il distribuait de ces étoiles jaunes, champignons rouges et blancs, qui donnent un surplus d'énergie. Il lance des boules de feu, il donne des coups de queue. Durant les accalmies, il se change en grenouille, ou en statue de pierre, pour que son pouvoir continue de nous irradier. Il fait mine d'enlever sa salopette sans bretelles, mais retire son short. Un individu louche vient alors lui arracher violemment son haut. Ce n'est pas très gentil. Il est tout nu. Un ver de terre, qui tient un boîtier gris super sonique, et pousse d'étranges cris ludiques. Il y a trente ans en arrière, le leader des Portes avait été fort embêté pour avoir potentiellement montré ses attributs. Ce soir, on voit tout, on s'en fout. Il faut croire qu'au fur et à mesure que l'univers grandit,  notre tolérance aussi. Un blond à la chemise blanche entrouverte se met à danser, à danser sa danse ontologique. La même que celui du dernier clip des Têtes Radio. Mais c'est le demi-borgne rock star qui l'a recopié, et non l'inverse. Lui il danse parce qu'il danse. Ça ne plaît pas à tout le monde. Il subit des lancers de pierres virtuels. Il faut croire que l'univers n'est pas encore assez grand par rapport aux dimensions de la pièce, pour qu'on puisse y être totalement libre. Le chef d'orchestre, à force de sauter de tuyaux joie en tuyaux éclat, a perdu son équilibre. Il  fait trébucher l'enceinte de gauche. Rien de grave, elle a plusieurs vies. Des corps se trémoussent sur les tables. Ça sent bon la transpiration.

Puis le jeune Harry Doux domicile prend la relève. Un anglais magicien à la baguette technologique, en forme de pavé. Au départ c'est un peu sage. L'air ne vibre pas assez. Les lignes nous passent au dessus de la tête, sans agiter nos neurones capillaires. Après beaucoup de bouton, les spasmes commencent à apparaître. L'audience entre en ébullition, se positionne périodiquement à égale distance du sol et du plafond. Hé sale cornichon, t'avais pas dis que tu me payerais un coup ? Dit l'un. Pardon ?! Dit l'autre. Salerpipopipette de trompette t'avais dis que tu me payerais un coup ! Dit l'un à l'autre. Mais je n'ai jamais dis ça, je ne te connais même pas ! Dit l'autre à l'un. POGOOOO ! Crient les uns aux autres. Et l'onde gagne en intensité. Les épaules se touchent en câlins passionnés. Ce qui peut apparaître comme de la violence sauvage aux yeux de peureux, n'en est pas. Si un malchanceux tombe, un cordon de protection se forme inopinément, jusqu'à ce qu'il se relève. Et le terrain de jeu est bien délimité. On s'amuse brutalement, entre gentleman délurés.

Dehors, il y a toujours autant de monde, on rentre et sort librement. Monsieur Pulsion de Sabre joue de l'air guitare. Je me repose sur un lit d'orge et houblon, sans trop y prêter d'attention. Tympon n'est pas toujours au top...

Débarquement des Surfeurs Pixélisés. Monologue d'introduction. Voix grave de conteur portée par des notes en échos. Multiples problèmes de baffles.  Leurs plages sont à moitié huit bit, à moitié six cordes. Idéal pour un surf sur la toile, un beach-volley entre deux formatages. Vague rythmée, pour revenir délicatement au monde réel, en quittant sa console de jeu, abandonnant manettes, boutons et croix directionnelles. Des couples dansent. Des copines aussi. Mais des méchants viennent les embêter. Les cloches sonnent deux coups. L'organisateur nous salut, nous remercie. Après les crédits, on nous indique la sortie.

A l'extérieur il y a les policiers, qui viennent eux aussi nous embêter. Fouillent, reniflent, nous collent aux murs. Nous donnant le sentiment d'être coupable d'un péché post-originel. La sécurité est la première des libertés, selon notre maire. Cela fait toujours un choc. Sortir du monde où les dragons kidnappeurs de princesses finissent dans la lave bouillante alors que les héros sont congratulés. Rentrer dans celui où il est interdit de sauter de niveaux en niveaux, où de dérangeants bugs nous arrêtent à chaque sortie châteaux. Levons le camp. Nous en avons tous bien profité. Mon ami peut-être un peu trop. Il joue à Pong, zig-zag du caniveau aux façades d'immeubles.

C'était un joli jeu, la durée de vie est plus que raisonnable, les environnements sont variés tout en restant cohérents. On est triste, mais satisfait, quand nos paupières viennent clore l'aventure.

GAME OVER

2 mars 2011

Autres choses


Diabologum - #3




Ce n'est pas tant une chronique de disque. Puisque, ce n'est pas tant que ça un disque. Autre chose. Autre chose dans mon expérience de vie. Il y en a quelques uns comme ça, des objets qui rentrent à l'intérieur de soi-même, qui y sont rentrés il y a bien longtemps, et qui depuis ressortent à chacune de nos paroles, de nos prises de positions dans le monde. On en a tous à l'intérieur de nous, de ces joyaux qui nous marque depuis toujours et à jamais. C'en est un. Un bon gros.

Je me rappelle l'écouter sur ma mezzanine, jeune enfant. Je n'y comprenais pas grand chose. Je répétais les mots. De la neige, de la neige, de la neige en été ! A force, ils sont totalement ancrés en moi. Des mots simples, banals. Avec de temps en temps des écarts, des mots savants qui ressortent de la masse, et viennent enfoncer le sens. Je les comprenais, dans le sens trivial du terme, "mettre à l'intérieur". Je ne voyais pas ce que cette œuvre pouvait avoir d'inaccessible, de difficile d'accès. Après tout, ce n'est que des monsieurs qui grattent, qui tapent, qui chantent, qui s'amusent. Alors on l'écoutait entre deux parties de bonshommes plastiques, ou tartines de patte chocolatée.

Puis j'ai grandi, et le monde avec moi. J'ai compris que derrière cette image de neige estivale, il y avait autre chose. Qu'il fallait voir plus grand. Que ça parlait aussi de ce décalage entre ma vision idéaliste, et la réalité concrète. De ce désordre apparent. Des multiples dérèglements qui viennent entraver le rêve. Que le son de guitare gras et bruyants, était un mélange de la fond et du forme. Que ce ciel gris mortuaire, était ce qui m'attendait à la sortie de l'école.

J'écoute. J'écoute. Je vis à gauche à droite et j'y reviens encore. Je continue d'ouvrir les yeux. Le constant se prolonge, creuse, creuse. Ce n'est pas perdu pour tout le monde. Oui, c'est vrai. Il faut en profiter. Pardi, ça c'est bien dit. Et ça ne gâche rien. Il est vrai qu'on s'amuse bien tout de même. Il y a, entre ces nombreuses dissonances, amas boueux, une sorte d'espoir. Quand la guitare vire dans les aigus, c'est bien cela que ça veut dire, que ça implique. Et puis tant qu'on peut jouer aux champions.

Puis ça continue. La voix morne, plate, inexistante. Une voix qui ne chante pas, qui est en perpétuel échec oral et mélodique. Cette manière de partir de faits réels, anodin, pour faire surgir le sens infini. Les guignols de l'info c'est rigolo. Il ne parle de rien, pour parler du rien. La plaine sonore en fond, le bruit qui ne s'arrête pas une seconde. Plus je vois cette pourriture, la remarque, et m'en extrait. Et plus je me sens bon.

Empilement d'années. Rendu par cet empilement de faits. Cette constellation de destins, d'impasses. Alfred trouve que sa vie est devenue trop ennuyeuse. Qui misent bout à bout constituent mon monde intérieur et extérieur. Les samples électroniques qui surgissent. Des explosions. Des sifflements aigus. Des petits bips caverneux. Et cela donne une chanson, cela donne une vie, un point de départ tout comme une destination. Cela donne un itinéraire de promenade, la seule promenade qui nous est possible, et qui devient donc la plus belle, la plus essentielle. A découvrir absolument.

Ça défile un peu plus. On avance dans la déstructuration, dans l'écroulement des certitudes, des croyances. Et ce constat de solitude, d'absurde devient un hymne collectif. Il n'y a rien à gagner ici, à part sortir quand c'est fini, main dans la main, de celle qui nous a choisi. A part chanter, jouer, frayer. A part détruire les murs, à part écouter cette longue ligne de guitare qui me berce, qui se ballade en montagne russe en se reposant sur les roulements de peaux de tambours. A part crier haut et fort, et dépasser, se dépasser, tout dépasser. Il n'y aura rien à gagner ici. A mes oreilles, le sens devient inverse. La rage devient combat actif contre le mal.  Devient appel à aller ailleurs, devient message rassurant quand à la pourriture environnante, que je ne suis plus le seul à percevoir. On passe d'inquiétude à révolution.

Ce n'est pas de l'optimisme creux, de l'espoir bisounours. Il n'y a pas de fin heureuse. C'est autre chose. C'est le mouvement post-tragédie, c'est l'action malgré la paralysie dramatique. On ne peut pas dire, pour eux, ça va bien, eux, ils sont heureux. On ne peut pas dire, c'est parce que j'ai raté le coche, c'est parce que ce n'est pas encore mon tour, que moi je ne surf pas sur la vague, mais bientôt j'emménage dans un château rose en Espagne ... Non. Il n'y a pas de réalité fictive et merveilleuse dans laquelle il est très dur de se reconnaître en temps de chute. C'est un plat morne et triste, où la moindre agonie orale devient acte de puissance. C'est de la pop qui fonctionne même au beau milieu d'un cimetière mondial. C'est un premier pas vers le dépassement de la morosité ambiante.


Puis je pourrais continuer encore longtemps comme ça. Parce que je n'ai pas tout dit, et qu'à vrai dire, je continue à en apprendre. Je pourrais me faire une mauvaise psychanalyse. Partir de cet album pour décrypter tout les symboles qui jonchent ma route. Parler du monologue cinématographique. Parler des autres paysages. Parler des silences. Parler des arc-en-ciels posthumes. Parler de la dissonance harmonique. Parler des mots qui me hantent. Parler. Mais je laisse l'orgue de fin, la musique d'enterrement de notre génération vide faire le boulot de clôture. Et cette voix punk

25 février 2011

BAGATELLES



C’est le titre du concert. 

Mot léger, vif, expressif. Petit rien, frivolité. Composition légère.
Un duo : le hautbois et l’accordéon. Assemblage intrigant.
L’image est curieuse mais engageante, laissons nous tenter. Nous voilà partis, par ce gris matin, à la rencontre de cette découverte musicale.
Opéra, lieu magique, hors du temps.
On s’installe, s’émerveille sur le décor majestueux. Nous sommes entourés de noms illustres : Beethoven, Rossini, Schubet, Mozart, Weber, etc. Sous leur regard bienveillant, nous nous ouvrons à l’interlude musical.
Les lumières s’éteignent, une ambiance tamisée nous invite à nous laisser pénétrer.
Un son lointain qui se rapproche doucement, nous enveloppe d’une douce quiétude.
Claquement
L’intrus, sans gêne, impose son monologue.
Les duettistes se rejoignent. Le ton est donné. Jeu tour à tour sérieux et impertinent, grave et badin, profond et léger. Merveilleux assortiment des sonorités du hautbois et de l’accordéon, différents et pourtant proches. On se laisse porter, enchanter par les bagatelles de Ligeti et les lieder de Schubert. Nul besoin d’être spécialiste. Le concert est ponctué d’intermèdes annoncés par les premières notes vivifiantes de l’Allegro Con Spirit et les musiciens dévoilent alors quelques traits des deux compositeurs et de leurs morceaux aux béotiens que nous sommes.
L’heure s’écoule, fluide, dans un ravissement auditif.
Voilà, c’est la fin.
Besoin de s’ébrouer, comme pour rajuster le costume de la vie quotidienne.
Je reviendrais.


Pour vos oreilles :

et

20 février 2011





C'est ce qu'il me faut, le matin, pour me sortir du lit. Sinon, je peux rester coucher encore de longues heures. Mais devant un tel déploiement d'énergie, je me lève. Ou plutôt, c'est cette musique qui lève mon être, pas moi. Envoyer du lourd est sans doute une expression d'origine japonaise. Pourtant, on ne croirait pas comme ça. En voyant la pochette rose. En entendant les premières notes. Toutes calmes. On ne s'attend pas à un tel déferlement. J'ai toujours aimé les batteries qui tape beaucoup. Parce que pour moi, c'est tout ce qu'un batteur est capable de faire. Taper, taper, taper. Alors oui, ici, ça tape, ça tape, ça tape. A haute célérité. Et à côté, la gratte évolue librement. Elle trace son chemin, un sillon météorique. Son chant est reconnaissable entre mille. Une distorsion grise qui aplati, aiguise le son. C'est une lame de fond au milieu d'un désert. Un énorme rouleau en perpétuel cascade. La voix est débridée, pleine d'allant impératif. Tout ce mouvement en avant semble aller de lui même, ne nécessiter ni la présence d'un support, de l'autre, d'un espoir, d'une quelconque conviction future. Sans raison particulière, cause légitime, l'afflux d'énergie envahit mon espace matinal. Me fait passer par tout les états possibles de conscience, à la vitesse du photon. Après, je suis blindé, rechargé en invincibilité. A fond. A fond dans les tympans, à fond dans le monde, à fond durant 55 minutes et 23 secondes, à fond dans ce qui précède et ce qui suit.

3 février 2011

Mise en audition



Ce sont mes amis. Ils accordent leurs instrument. Je paye une tournée de bière, pour me sentir à l'aise. Aussi bien au niveau de la gorge que de l'ego. Difficile d'ouvrir le trépied à clavier, difficile de monter le son du clavier. Pour décapsuler les bières, ce fut facile. On se met en route. Le chanteur renverse sa bière, torse nu pour faire sa rock star auto-dérisoire, puis passe la serpillière à l'aide de son tee-shirt, en star de ménage. Il le remplace par une chemise. La classe. Les préliminaires sont toujours longs, le temps de frotter charnellement la peau des tympans, les cheveux de guitares, les uns avec les autres. On repart. Avec un peu plus de distorsion.
La brisure des mondes. Une armée en marche , une armée de soldats déjà au courant de l'abjection guerrière, déjà déçus, sans plus aucune illusion. Brisées. Terminées. Histoires Terminées. Ce rassemblement de beaux garnements s'appelle Histoires Terminées. Ils vont tout droit dans le feu des combats, la fumée des blindés, les carcasses de soucoupes volantes extra-néant. Le bassiste boit la bière réservé au batteur, ce n'est pas grave, il fait abstinence.

L'humain piétine la cendre, une bouteille de sperme fermenté à la main droite. La trinque sur une machine noire. En zigouillant un européen qui traîne, à sa gauche, d'une balle bien placé. Gros rire gras. Belle rasade. Plus en avant sur la terre vaine.

Un solo de piano vient se rajouter à l'incipit. Pour signifier le temps que la vision atteigne notre héros désesperados. Un silence précède l'impact de la première bombe. Cratère tragique. Le chanteur récupère sa bière perdu chez le bassiste. Salive commune. Il faut composer, il faut mettre en place. Se regrouper en cercle, s'échanger les instruments, pour trancher sur le cap à suivre. Certes, chaque matelot a sa fonction, propre, son artisanat personnel. Mais tous ensemble, on part plus confiant à l'abordage, tous ensemble, on tranche plus de tête adverse. C'est le jeu coordonné de deux grattes qui pose problème. Ce qui sonnait bien avant, désormais faux, dissonant. Mauvaise oreille, mémoire défectueuse, ou changement de constantes universelles. Nul ne sait. La pièce est à réinventer perpétuellement, en revenant sans cesse à son essence originelle. Bordons la gran'voile, rodons la coque, les vagues nous guident à la lisière.

Puis l'humain tire plusieurs coups en l'air, vers les nuages gris. La balle ne retombe pas. Elle ne retombera pas. Ou plutôt, elle est déjà retomber, elle ne fait que retomber, continuer le drame.

A un moment de la chanson, il se passe quelque chose, c'est indéniable. Appelez cela Musique au sens oligarchique, néo-émotions, évènement immanent, ou explosion massive de synapses. Comme vous voulez Ce que cela veut vraiment dire, s'exprime en notes. Si l'un des membres rate le coche, cela n'arrive pas. Alors il faut refaire le coche, retiré un bon coup. La basse perdure, peu importe les fluctuations du code civile. Les autres arrangements se sédentarisent. Savoir où partir, quand partir, pour partir ensemble. On aurait du enregistrer les balbutiements des groupes panthéoniques, afin de comprendre comment construire une symphonie à échelle humaine. Cela ne surgit pas dès les premiers biberons. Un travail est nécessaire. Un recommencement. Reprenons après digestion progressive.

Déhanchement nucléaire, sur fond de gouffre. Un humain se ballade entre deux néants. Il lance une larme à l'horizon. Nuées de corbeaux atomiques. Fondent sur le monde, et le brise. Non. Il faut instaurer un jeu de question réponse entre les deux guitares. On reprend.

Pluie grise s'éclate un morceau. Érosion creuse un gouffre. Un humain chute dans la faille. Son corps tombe horizontalement, au ralenti. Il regarde l'écran néant au dessus de lui. Ce que certain appelle ciel. Ciel d'un monde brisé. Non. Un léger silence est nécessaire avant le deuxième assaut. Pour que les coups portés aient plus de poids. On reprend.

Égorges éventres et cris à haute voix ce que tu  vas écrire sur ton épitaphe, couds ton propre cercueil, transforme-les en machine de guerre. Tire. Tire. Fais Feu violemment. Fais un amas de cendre. Et brise la braise, brise la braise, tu devras briser la braise. Non. Les cadavres ne doivent pas avoir le temps de se reposer, la pause doit être moins longue.On reprend.

C'est la vague militaire qui arrive au loin. C'est les funérailles de la rupture. C'est la berceuse que l'on chante, au moment où le monde rentre dans son dernier sommeil. Ce qui brise le monde réel. Non. Erreur de temps sur la plainte orale. On reprend.

Une dernière avant de partir. Quatre pieds tapent le sol, soit quinze orteils droit et un talon gauche.

Un humain marche le long de la brèche. Ses pas sont lourds, sa respiration se fait de plus en plus difficile au fur et à mesure qu'il progresse. Ce siffle. Apocalypse en dehors, et à l'intérieur de lieu. Il continue d'avancer. Puis.

On débranche, range les fils et le clavier, replis le trépied. C'est terminé. TALES OFF