27 décembre 2010

Christmas Blues

Noël est passé. Ces 364 jours d'attente se voient renouvellés en quelques minutes seulement. Mais des minutes de pur plaisir, où on déballe ses cadeaux avec la même fougue qu'il y a 10 ans. Seul le contenu change : des CDs, des CDs et encore des CDs. Tous de blues ou de jazz. Exactement ce que j'avais demandé. Et puisque Noël est aussi un grand moment de partage, voici quelques morceaux choisis parmi la multitude d'artistes qui se sont invités dans mon PC. Que ce soit le déchirant Cry For Mother Africa d'Harrison Kennedy, le minimaliste mais efficace Going Back To Memphis du duo David Maxwell & Louisiana Red, le psychédélique Booty Bumpin' d'Eddie Turner, l'éternel et increvable Eric Clapton avec son Run Back To Your Side, le très bon harmoniciste Charlie Musselwhite et son Rambler's Blues, la très bonne surprise Part Time Love de Magic Slim & The Teardrops ou encore les classiques et légendaires Muddy Waters, Champion Jack Dupree, Robert Johnson, Sonny Boy Williamson, Memphis Slim, Lightin' Hopkins, Willie Dixon, Tympon vous souhaite un JOYEUX NOËL et surtout une bonne écoute.





26 décembre 2010

Fais Dis Fabrique Pense

Une longue soirée en forêt, le ciel étoilé. Une berceuse chantée par plus de dix instruments caressés par de talentueux artistes. Un petit voyage entre guitares et percussions autour d'un feu de camp dans les hautes forêts canadiennes.
Ou peut-être une matinée bercée de soleil dans une plaine infinie où paissent les bisons.
Ou encore une montagne fleurie, avec des chamois se délectant d'un pâturage aux mille épices colorés.
Je ne peux pas d-écrire, mais vous pouvez écouter.

3 décembre 2010

Utopie


Ce soir, c'est là bas qu'il faudrait être, c'est là bas que je reverais d'être. Ce soir, c'est là bas qu'il y a l'histoire, l'Histoire. C'est là bas, que ca se passe. Pour les mélomanes, c'est un évènement de grand ampleur. Une de ses choses qui peuvent ressortir 50 ans après, devant les petits enfants. " J'y étais". Non, ce n'est pas le Stock de Bois, ni le concert de Cologne, ni le Manchester de Robert, ni le pénis de la Porte, la guitare en feu de chaman afro. C'est un retour. Le retour des Empereurs Noirs de l'immanence vitale. Le retour de ce petit groupe de copains canadiens, qui aiment se rassembler et gratter simplement de leurs instruments. Le retour d'une certaine forme de poésie. Et puis, comme si cela ne suffisait pas, cela se passe au bord de la mer, entre camarades de bon gout. Pendant quelques jours, un communauté idyllique, indépendante, nageant en plein bonheur. Oui, c'est là bas qu'on devrait tous être. C'est là bas, que la belle musique s'écrit, se joue. Là-bas ...

16 novembre 2010

Jeux Vidéo et Poésie




Un petit chien. Un petit lutin au bonnet blanc. Un vaisseau en forme de conserve spatiale. Un robot qui sommeille. Des bestioles à trompe. Un escargot assoiffé qui martèle sa maison. Des toiles d'araignées. Une mouche. Des coléoptères. Un réfrigérateur débranché. Un petit extraterrestre qui range des poires. Une saucisse pendue. Un gros extraterrestre qui regarde sa télé. Une panne d'essence. Un papillon qui virevolte. Un étrange sage qui demande sa pipe. Des fourmis qui escaladent un arbre. Un putois agressif. Un chauffeur de taxi assoupi. Du café, du rhum, de l'huile de foie de morue. Un lamantin qui dort, d'autres qui volent. Une danse joyeuse autour d'un feu de camp

14 novembre 2010

Alchimie du Bruit / Cogito Boueux

Ça s'appelle Patience. Patience de quoi ? Depuis quand il nous faut patienter ? J'en ai marre moi, d'attendre. Attendre d'enfin savoir ce que j'attends. L'image c'est une grosse tache marron blanche, un rond de crotte, un point en explosion. Disons une fleur de boue.

Dead C - Patience



Si on définit la musique comme une expérience, un passage à travers des vibrations de l'air, alors tout ce brouhaha est nécessairement lié à une expérience de vie particulière, à des souvenirs, à des émotions sommeillant en nous. Tout un tas d'éléments que la musique récupère, vient remuer, triturer. Écouter de la musique revient à faire une psychanalyse, mais une vraie, pas un test de fauteuil. Une opération chirurgicale systématique, un chamboulement ontologique. Il y a dix ans, je n'écoutais pas le même type de musique. Il y a 10 ans, je n'étais pas le même. Mes affects, mes dispositions à ont changé.
Je me rappelle. Au départ, c'était du punk rock, tout doux, qui donnait envie de sauter en agitant les bras. Après je me suis lassé d'écouter des ordres grotesques, sans aucune profondeur. Et puis on se rend bien compte que dans la vie il ne suffit pas de sauter en agitant les bras. Ça ne fonctionne pas. Aller vous trouver un job avec ca. Allez nourrir une famille. C'est un mensonge. Ils sont tout gentils et ils se font les couilles en or sur notre dos. Mais on n’est pas invité à la fête.
Alors je suis passé à autre chose, naturellement. À ceux qui crient avec moi, ceux qui éventrent les bourgeois assis dans leurs fauteuils de velours. Ça crache beaucoup. Les structures sont plus complexes. Mais là encore, ça ne fonctionne pas. La première fois qu'on entend taper du poing sur la table, on est confiant. Mais quant à la centième fois, rien n'a changé, on l'est moins. Les gens sont toujours aussi sales. Soi-même, on n'est pas sur d'être convenable. C'est un peu facile d'entonner la révolution sans dépasser le seuil de sa porte. Ce qui est intéressant, c'est ce qui se passe entre les cris. Lorsque l'on est passif. Je continue à grandir. La solitude, le vomi, la tristesse deviennent une routine. Comme des zones grises prévues d'avance sur le calendrier. Qui reviennent selon l'éternel retour nietzschéen. Rien de bien incroyable. Ça arrive à tout le monde, plus ou moins fréquemment. La société fourmille de désespérés. Trop facile de se faire passer pour le plus à plaindre de tous. C'est des conneries. Le commun se créé dans le constat collectif de son impossibilité. Tous perdus. Et pourtant on perdure.
J'attends. Mon cœur se remplit par la droite, se vide par la gauche. C'est vrai, il y en a pour qui tout va bien. Qui ne se sentent ni aliénés, ni entravés, ni grignotés. Ceux-là essayent de garder leur inertie. Ne se mettent pas en contact avec ce qui pourrait les déstabiliser sur leur envolée. Rien de puissant. Rien de fort. Seulement des effleurements, afin de ne pas tomber. Je pense malheureusement qu'ils se trompent. Qu'ils finiront par chuter, nous rejoindre. Qu'ils finiront par ne plus avancer loin de tout souci. Le choc risque d'être rude. À force de se vanter d'être un funambule au dessus de la boue, de chier sur les crapauds, on se fait avoir. Par un pieu, un bovin tombé du ciel, un naufrage intempestif, un mauvais lancé de dés.
Je n'ai plus d'inertie. Je n'ai plus d'illusions. Parfois j'ai des sursauts. Je sais les utiliser à bon escient. Je sais m'en servir pour être constructif, avancer. Puis de nouveau, rien. Du sur place.
Voilà ce que c'est que cette musique. Du sur place. Du vide. De l'absence. Elle ne vous demande rien.  Ni de sauter en l'air, ni de crier. Ce n'est pas de la musique faite par des individus extérieurs, qui vivraient dans le meilleur des mondes et qui nous en passeraient gentiment un bout. C'est de la musique faite par et pour nous. Nous qui ne comprenons pas les rouages. Qui avons perdus depuis longtemps le manuel. Qui en avons marre de lancer les dés, de suivre des règles absurdes qu'on nous impose sans aucune légitimité. Nous qui sommes seuls devant l'écran. Avec l'envie que quelque chose de réel se passe. Qu'on arrête de se foutre de notre gueule en nous prenant par des pincettes, pour mieux nous jeter parmi les ordures sans se salir les mains. Nous qui avons saisi le pluralisme dans toute son étendue, c'est-à-dire seulement qu'une partie. Ça suffit les machines stupides qui ont plus de droits que nous. Ça suffit l'harmonie que tout le monde suit sans que cela ne nous conduise nulle part. Cette musique n'est pas un placebo. Ce n'est pas une marchandise vendue ayant pour but de nous donner l'illusion d'avancer. Cette musique n'est rien. C'est ce que l'on porte avec nous. Ce que l'on peut poser sur la bibliothèque. Parce qu'elle y restera. Le bruit, c'est ce qu'il y a avant la musique. C'est ce qui témoigne le mieux notre impuissance de la formuler clairement. C'est ce qui ne demande aucun effort. Pas besoin d'aiguiser ses tympans, de les saupoudrer de fond de teint, de les préparer à une réception grandiose. Non. Elle fait le boulot à notre place. Elle se glisse vulgairement dans notre être, notre existence. Toute proche. Elle est avec nous mêmes lorsque nous sommes parti. Avec Je.
C'est pour ça que je l'aime. Parce que qu'elle est toujours là, toujours accessible. Elle ne va jamais se balader autre part qu'en moi. Elle ne me parle pas de choses qui me dépassent, ne se permet pas de critiquer mon incompétence,mon ignorance. Je peux m'y reposer. J'ai totalement confiance en elle. Mon inquiétude disparait. Et à partir de là, de cette base solide, de cette espèce de cogito boueux, je peux repartir. Aller un peu plus loin qu'avant. En sachant qu'elle amortira ma chute, qu'elle ne m'abandonnera pas sur le bord d'une mélodie d'autoroute, d'une harmonie de palais. Que ce n'est pas une illusion. Que je suis bien vivant, même noyé dans la boue. Plus d'artifices, plus de mensonges. Plus de contes héroïques alors que moi je suis cloitré dans mon donjon solitaire. L'espoir se crée dans la boue. La vie se conçoit en sous-sol. Le soi-disant progrès qu'on nous vend tous les jours est une fumisterie. Je retourne à l'âge primaire. Quitte le banquet de la beauté, la folie dionysiaque, pour rentrer chez moi et me reposer, enfin.
À l'image de la dernière chanson. Le meilleur des mondes, ce n'est pas lorsqu'il y a un paradis dans les nuages, mais lorsque même l'Enfer devient Amour.

11 novembre 2010

Timbre de boix

Timber Timbre



Pour accompagner un jour férié. Pour remplir le ciel bleu au dehors, le plafond blanc en intérieur. Pour précéder la bouilloire qui s'apprête à chanter, car l'eau du thé est prête. Pour parler au chat qui pétrit le canapé bleu du salon. Pour pardonner aux papiers qui tombent doucement du bureau. Pour agrémenter le pot de beurre de cacahuètes presque vide, celui de spéculos encore bien en forme. Pour remercier mon ami lointain qui m'a montré cette jolie voie. Pour nager dans sa grande baignoire océanique. Pour ressentir la glace crémeuse et grumeleuse, qui fond dans le palais. Pour comprendre les hauts palmiers dont les feuilles semblent se coucher en compagnie des nuages. Pour célébrer la simplicité, la beauté du gâteau au yaourt. Pour couvrir les ronflements de ma Mamie. Pour se préparer à retourner au travail. Pour s'en satisfaire. Pour s'en foutre.

2 novembre 2010

Contes des Filles de la Ville du Soleil II


Grotto Of Miracles / Midnight Cowboys From Ipanema



C'était en 1986, avec la Grotte aux Miracles, et les Cowboys Nocturnes d'Ipanama. C'était un CD inconnu distribué au hasard par les membres du groupes et une cassette absurde qui a finalement été promue au laser, quinze ans plus tard. Symbole de l'ouverture infinie du trio, le spectacle s'ouvre sur une reprise d'un des hits de la radio de Tanger. Puis on trouve sur un hymne dépressif, très simple, presque vide, mais oh combien puissant, sur un différent type de putain. Et les miracles se succèdent, du jazzy pour lesbienne, du swing pour rois, un  air de muezzin version rock. Toujours cette touche orientale, cet attrait de l'ailleurs, comme on peut aussi le percevoir dans la poésie rimbaldienne, les contes nocturnes, ou les envies de jeunes bourgeois. Il y a aussi un long et obscure monologue, accompagné de quelques accords à la cithare, qui tentent de percer le mystère de la mort. Construction sonore qui apparaitre souvent, tout au long de la discographie. Et qui s'accorde très bien avec la folie ambiante, le mysticisme omniprésent, la quête d'une immanence transcendantale. Quand les cowboys font leur entrée, ce n'est plus du tout la même chose. Chaque galette est différente de la précédente, et il est très difficile de suivre la progression si on se cloisonne à une vision précise. Là, nous avons à faire à trois branquignoles en possession d'un enregistreur cassette, avec plusieurs idées farfelues en têtes. Certaines sont commencées puis abandonnées, d'autre sont jouées jusqu'au bout, de manière plus ou moins stupide. Et entre ce bruit, les trois amis se parlent, dissertent sur des bêtises. Un road song en béquilles. Pour le plaisir de jouer de la musique, pour la beauté des vibrations de l'air, pour les chameaux et les armées de spermes. Et un peu pour nous, quand même.


29 octobre 2010

Ouvert vers où

La musique comme manifestation sonore. La musique comme présence physique. La musique comme vibration de l'air. Pas pour roucouler dans sa voiture, par pour caresser les minettes, pas pour s'aérer les couilles, pas pour tremper dans son thé. La musique pour dire ce qu'il y a dans les mots imprononçables et imprononçés. La musique pour voir ce qu'il y a dans le bruissement des feuilles, dans la chute d'un tronc. La musique parce qu'il y a quelque chose qui fonctionne. Pas pour occuper du vide, pas pour manipuler les échines, pas pour nourrir les pigeons. La musique pour voir l'ailleurs d'ailleurs, la fureur de l'intérieur, l'univers qui en découle. Pas pour se divertir, pas pour se donner l'illusion de vivre, pas pour faire office de dessous plat, de briquet, de baie vitrée. La musique des doigts qui saignent. La musique des tympans qui explosent. La musique des corps qui s'évanouissent. La musique des murs qui s'écroulent. Pas pour effleurer, pas pour assaisonner, pas pour digérer. La musique qui ne pose aucun problème. La musique qui ne suppose aucun passif. La musique qui n'appose aucun système mais qui au contraire s'oppose à toutes les camisoles, les architectures, les lois de l'entendement. Pas pour faire silence, pas pour accompagner la danse, pas pour remplir les cahiers et les placards. La Musique. C'est celle là que l'on voudrait. C'est vers celle là, qu'il faudrait aller.

Contes des Filles de la Ville du Soleil I



Ce sont trois rois mages. Les deux frères Bishop, et le grand Gocher ( paix à son âme ). Ce sont trois personnes désireuses de jouer de la musique, la produire, la faire fonctionner. Il n'est pas question de talent inné, de génie miraculeux. Mais d'un élan créateur. Remplit de liberté, de folie, de néant, de débordement, de nectar d'oreille aussi bien que d'ordure pour tympan. Pendant une trentaine d'années, des chansons naissent, beaucoup de chansons. Elles s'accordent rarement au goût des contemporains, mais elles continuent pourtant leurs propres voies, explorant des contrées inconnues et insoupçonnées, les multiples côtés d'un ruban de Möbius. Nous allons tenter de les rattraper, nous allons repartir du début, refaire pas à pas tout le cheminement qui nous conduira aux plus beaux des paysages, le soleil, la ville du soleil, les filles de la ville du soleil, les SUN CITY GIRLS.











Il était une fois un premier album éponyme, en 1984. La longue aventure commence par un coup de gong. Un certain goût du silence. D'autres gongs. Puis du bruit, des guitares, des batteries. Une naissance agitée. Un riff, qui pourrait être entrainant, habillé de Pop. Mais il est dénudé, lynché, jusqu'à révéler sa valeur brute. Et pourtant, on a bien envie de danser. Des sonorités venues d'ailleurs, un mélange. Un surf rock assorti du discours d'un oncle révolutionnaire. Du rock torturé. Les sons s'entremêlent, nous perdent. On sent bien sur, un certain côté amateur. Comme si nos voisins de palier avaient soudainement découvert de vieux instruments rouillés au fin fond de leur garage et qu'il ne pouvaient s'empêcher d'en jouer inlassablement. Et malgré l'absence de beauté évidente, ils s'en fichent. Ils ont confiance en la musique, en la logique interne des vibrations de l'air. Laissons les notes se débrouiller entre elles. Les gammes, c'est une invention fasciste. 
On y trouve des discours de films d'horreur, des voix terrifiées, des rires, des roulements de tambours, des cris de cordes, des aboiements, un rap déstructuré, des saxophones éphémères, des plaines vides, des aubes, des apocalypses.
Comme une mise au claire. Nous ne sommes pas ici pour faire de la musique comme certains veulent planter des légumes. Nous sommes ici pour que la musique se fasse comme certains légumes poussent. Nous ne sommes pas ici pour la confiture ou les revolvers, nous sommes ici pour les séismes d'oreiller, les éruptions sous cape, pour voir Dieu en érection. Nous sommes ici mais nous ne sommes déjà plus là. Nous sommes ailleurs. Nous sommons, nous multiplions, nous remuons. Quelque chose comme cela. Quelque chose de semblable à la pochette, un homme qui tombe, s'envole, s'écrase, se noie, s'endort, tout en même temps. Quelque chose de fou. Quelque chose de nouveau, qui ne fait que commencer.


10 octobre 2010

Quand Les Grands Esprits Se Rencontrent


- Je suppose que dans la salle, tout le monde connait Stairway To Heaven...
- Ouiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii !!
- Et je suppose aussi que c'est tout ce que représente Led Zeppelin pour vous...
- Ouiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii !!
- *sigh* (mal)Heureusement je ne suis pas là pour vous dire ô combien vous êtes stupides mais simplement pour vous parler du groupe qui a inspiré à M. Page cette chanson devenue mythique : Spirit.


"Many sounds don't make sens. But one thing is Clear : Spirit"


Je ne comprends toujours pas comment ce groupe a pu tomber dans l'anonymat total alors qu'à son époque il était presque plus connu que The Doors. Si je devais leur définir un genre, je parlerais de folk rock progressif. En gros, vous prenez quelques tranches de King Crimson, un zeste de Jefferson Airplane, vous mettez le tout dans une casserole, vous saupoudrez de jazz et de blues, vous laissez bouillir quelques heures et vous obtenez Spirit. L'album commence avec le très sympathique Fresh Garbage au clavier très bluesy et à la voix extrêmement agréable. L'ambiance générale du morceau donne sacrément envie de bouger mais pas trop, juste ce qu'il faut. Le ton est donné : Spirit n'est pas là pour vous faire sauter de tous les cotés ou encore vous faire littéralement planer comme un Us And Them le ferait. Non. En écoutant cet album, vous vous sentez bien, relax, heureux. Votre esprit danse, swing mais votre corps lui est bel et bien reposé. En écoutant Mechanical World, on commence à percevoir le coté progressif/psychédélique du groupe. Elle commence à la façon d'Alabama Song des Doors, se lance dans des contrées angoissantes, se calme un peu, reprend et se termine toute en douceur d'une manière assez belle. Vient ensuite mesdames et messieurs *roulements de tambours* Taurus !! *long silence* Je vous sens sceptiques... Mais si maintenant je vous dis que c'est cette chanson qui a provoqué en Jimmy Page le profond désir de marquer un tournant dans le monde de la musique, l'envie irrésistible de composer un des plus grands solos de guitares au monde, l'inspiration divine qui lui a donné le pouvoir de mettre en forme Stairway To Heaven (et accessoirement de réduire Led Zeppelin à cette unique musique *sigh bis*), là vous réagissez déjà plus ! Et c'est vrai que ces notes de guitare font quand même sacrément penser aux escaliers du paradis. Le tout accompagné magnifiquement par un clavier et des violons mettant parfaitement dans l'ambiance. S'ensuit alors Girl In Your Eye, très jolie chanson aux sonorités indiennes, délicieusement relaxante et reposante. Avec Gramophone Man, on ressent parfaitement bien l'influence jazz (pour notre plus grand bonheur) du batteur Ed Cassidy. La chansons alterne entre passages un peu rocks et d'autres purement jazzys (chabada, walking bass et tout le tralala, les puristes me comprendront). Un régal. Et pour finir, ils se lâchent totalement avec Elijah. Pour résumer, c'est un peu leur 21st Century Schizoid Man ou bien encore leur How Many More Times : 11 minutes de pure improvisation, un condensé de tout ce qu'ils savent faire (et dieu sait qu'ils le font bien !),  du rock, du blues, du jazz, du folk, des solos (basse, batterie, guitare, clavier, tout le monde y a droit). Une belle démonstration de rock progressif.
Bref, cet album est un pur bonheur pour les oreilles et pour l'esprit. Avec un nom pareil, on ne pouvait pas s'attendre à autre chose.

9 octobre 2010

Cirque

D'après le Petit Larousse Illustré, le cirque est une enceinte circulaire où se donnent des spectacles équestres et acrobatiques. Le folklore est l'ensemble des traditions, légendes, chansons et usages populaires d'un pays. L'obscur est ce qui n'est pas éclairé. Du coup, si l'on se réfère au Petit Larousse Illustré de 1979, le New Weird Folk Dark Circus Circus Dark ou Folk Strange Gospel Circus Experimental Dark Pop Cabaret est une nouvelle musique acrobatique qui galope au rythme des vielles traditions obscures et usages étranges du cirque. Mais plutôt que de rester le nez dans le dictionnaire, allons voir à quoi il ressemble, ce cirque. Ne vous inquiétez pas, c'est moi qui invite.







Beat Circus - The Ghost of Emma Jean

Le caissier à l'entrée du chapiteau fait tourner sa machine. A côté de lui, la jolie hôtesse déchire délicatement les tickets des clients qui rentrent. Ils sont de tout types. De petits enfants curieux, des vieux lassés cherchant de quoi réveiller leurs cœurs monotones, des couples se tenant par la main. Tout ce petit monde fait la queue, passe sous la toile du chapiteau, et s'installe sur les gradins. Les places se remplissent petit à petit. Puis la caisse se referme. Quelques derniers mouvements pour ajuster les popotins sur les bancs de bois. Et le cirque commence.

Beat Circus – Judgement Day

Un homme coiffé d'un long haute forme rentre au milieu du chapiteau. C'est le patron. Il nous souhaite la bienvenue. Très sobrement, avec une lente voix caverneuse. Nous préviens que toute l'affaire est très sérieuse. Que sa troupe vient d'une lointaine contrée, qu'elle sillonne le pays depuis des temps ancestraux. Nous pris de bien ouvrir les yeux car d'incroyables évènements vont se dérouler en ce lieu, pour notre bon plaisir. Il salut la foule, et, en continuant de la scruter du regard, recule jusqu'à disparaître dans les loges.

Alec K. Redfearn & The Eyesores - Valse

La troupe d'acrobate fait son entrée. Ils dansent sur le sable. Leur corps valsent dans les airs, pirouettes, sauts périlleux. Et retombent sur leurs pattes, impeccablement, en éclaboussures de poussières. Tous se mettent en mouvement et forme un grande fontaine à jet humain. Le flux monte de plus en plus haut, grâce à des trampolines, à des cordelettes pendues. La source se déplace, fait le tour de la cour. Et d'un coup, toutes les gouttelettes humaines restent perchées. L'audience reste silencieuse, avant d'applaudir à rompre l'espace.

Beat Circus - The Life You Save May Be Your Own

C'est au tour des jongleurs. Ils utilisent dans un premier temps des balles colorés. Qui tournoient dans l'air tels des arcs-en-ciel. Des poignards tranchants se joignent à l'hémorragie. Puis des hachoir, des légumes. Une fois ceux ci hachés en l'air, cuisinés en soupe, nos jongleurs sortent en offrant la collation aux chanceux du premier rang.

Alec K. Redfearn & The Eyesores - The Night it Rained Glass on Union Street

Les trapézistes prennent possession de la salle. Grimpent les échelles, font se balancer les cordes. Un premier s'élance, traverse de bout en bout la distance qui le sépare de ses compagnons. C'est le signal de départ. A peine touche t-il le poteaux d'un bois qu'un autre s'élance. Ce mouvement de pendule continue encore quelque temps, puis les premiers saut apparaissent. Lâchés de main, double lâchés de main. Les cordages se tendent, les esprits font de même. Parfois, lors d'instants immobiles, le cascadeur voltige seul dans un espace-temps suspendu. Il n'y a aucun accident, et à la fin, on se surprend à trouver cela facile. Somme toute, il suffit de savoir jouer à la balançoire et d'avoir les main fermes.

Beat Circus - Coney Island Creepshow

Le présentateur annonce. Les monstres. Pas de jambes, pas de bras, ou cinq bras et quatre jambes. Ils arrivent. Une véritable invasion d'innommables créatures. Des poils de yéti, des écailles de saumon. Des siamois géants qui rampent sur le sol, chevauchés par des nains aux sourires déformés d'un horrible rictus. Rires gras. Une femme à tête en forme de marteau embrasse un homme à la peau aussi molle qu'une meule de beurre. A la fois effrayant et amusant.

Alec K Redfearn and the Seizures - Voice To Skull

La funambule. La belle funambule. En combinaison de cuir noire. Elle oscille dangereusement aux dessus de nos pupilles. S'étire tel un félin. Laisse sa chevelure tournoyer autour du seul fil la reliant encore à la vie. De ses mains fines elle se suspend, se balance, joue avec notre peur. Puis redescend enfin sur terre sur la pointe des orteils.

Alec K. Redfearn & The Eyesores - Coke Bugs

Défilé d'animaux exotiques. Des grenouilles fluos sautillent. Des iguanes tirent la langue aux spectateurs. Des essaims de mouches tracent de sombres motifs dans l'air. Des serpents s'avalent entre eux, se recrachent. Il y a même de gros poissons qui, en mouvement frénétiques, arrivent à se déplacer à terre. Un espèce de lutin chevauchant un zèbre à rayures circulaires dirige tout cela. Il parle sans doute une langue extraterrestre.

Alec K. Redfearn & The Eyesores - The Quiet Room

L'illusionniste apparaît soudainement au milieu du chapiteau, sans qu'on ait même aperçu son ombre. Il se lève de sa chaise, elle s'évapore. Il a les yeux perçants. De sa cape, il repeint le sable en noir. Ses mains s'agitent bizarrement. Ses doigts domptent des lueurs. De son chapeau sort une chauve souris, qui se transforme en corbeau. Des fantômes siègent à côté du public, entonnent un chant de chorale. Puis l'illusionniste salut la foule muette, s'allonge sous sa cape. On le revoit plus.

Beat Circus - The Rough Riders

Suite de la parade animale. Des chevaux en fille indienne, monté par des singes empilés. Puis des lamas entrent en scène, permettant aux singes de sauter de monture en monture. Les lamas crachent du liquide coloré, les spectateurs malchanceux sont trempés. Arrivent les majestueux éléphants, qui lèvent leurs trompes selon une chorégraphie quelque peu grotesque. Une jument à demi-licorne fait ramener tout ce petit monde dans les enclos.

Alec K. Redfearn & The Eyesores - Queen of The Wires

La reine des câbles métalliques se balance avec grâce à plusieurs mètres au dessus du sol boueux. D'amples mouvements de ses jambes nues nous entraine dans sa danse, et inconsciemment, on s'élève pour la rejoindre, et planer avec elle. Calmement. On observe ses formes harmonieuses aussi bien que ses gestes maitrisés.

Beat Circus - Hypnogogia

Aussitôt arrivé sur scène, un hypnotiseur ensorcèle une dizaine de personne. Tous se mettent à tourner en rond autour de lui, puis le portent tel un roi jusqu'aux vestiaires.

Beat Circus - The Gem Saloon

Trois clowns arrivent en trottinant, vêtus en arlequin déchu.. Ils semblent ivres. Commencent par de petites galipettes et galipopettes. Leurs nez sont bien rouges d'alcool. De leurs sacs, ils extirpent divers ustensiles, aussi loufoques les uns que les autres. Lance peau de banane ou épluche cornichon, qui finissent toujours par se retourner contre eux. Ils titubent, tombent à terre régulièrement. Se tapent dessus maladroitement, s'aspergent de liquide par inadvertance. Puis ils quittent la scène à cloche pieds, miraculeusement redevenus sobres.

Alec K. Redfearn & The Eyesores - Bent At The Waist

Une bande d'équilibristes prend le relais. Sur une roue, sur les mains, sur les épaules du camarades. Pyramide humaine. Sans cesse un mouvement, un élan. Sans cesse en train de s'effondrer et de se reconstruire.

Alec K. Redfearn & The Eyesores - Bulgarian Skin Mechanic

Pour le bouquet final, la troupe au complet réinvesti la scène. Les acrobates dansent sur le dos des pachydermes. Les trapézistes volent sans fin. La funambule utilise les serpents comme filament. Il suffit d'un geste sec du patron pour que toute la machine se ralentisse, avant de repartir de plus belle. Les singes se lancent des grenouilles. Les clowns avalent le crachat des lamas. Les jongleurs se jonglent eux même. L'illusionniste fait équipe avec l'hypnotiseur pour évacuer mystérieusement les spectateurs, sans que ceux ci n'aient franchi aucune porte de sortie. La folle parade continue alors qu'il n'y a plus de spectateurs. Ainsi, personne ne sait ce qui se passa ensuite sous le chapiteau magique. Demandez au prochain gnome que vous croiserez en forêt, lui saura vous renseigner.

8 octobre 2010

Le Dernier Jour d'Un Condamné [Part One]



Je levai la tête. Le ciel était bleu, et les rayons chauds du soleil, découpés par les longues cheminées, traçaient de grands angles de lumière au faîte des murs hauts et sombres de la prison. Il faisait beau en effet. A quoi bon ? Je suis condamné aux frais, et tout ce que j'ai y suffira à peine. La guillotine, c'est fort cher. Je laisse une mère, je laisse une femme, je laisse un enfant. Je viens de voir, crayonnée en blanc au coin du mur, une image épouvantable, la figure de cet échafaud qui, à l'heure qu'il est, se dresse peut-être pour moi. J'ai fermé les yeux avec horreur, alors j'ai tout vu plus distinctement. Rêve, vision ou réalité, je serais devenu fou, si une impression brusque ne m'eût réveillé à temps. Je regardai avec terreur tous ces profils sinistres dans leurs cadres de fer. Malheureusement je n'étais pas malade. Pas malade ! en effet, je suis jeune, sain et fort. Le sang coule librement dans mes veines ; tous mes membres obéissent à tous mes caprices ; je suis robuste de corps et d'esprit, constitué pour une longue vie ; oui tout cela est vrai ; et cependant j'ai une maladie, une maladie mortelle, une maladie faite de la main des hommes. Me voici transféré. Je me suis levé, j'ai fait un pas ; il m'a semblé que je n'en pourrais faire un second, tant ma tête était lourde et mes jambes faibles. Je me sentais  emporté avec stupeur, comme un homme tombé en léthargie qui ne peut ni remuer ni crier et qui entend qu'on l'enterre. J'étais devenu machine comme la voiture. Je me sens les cœur plein de rage et d'amertume. La mort rend méchant. Je me revois enfant, écolier rieur et frais, jouant, courant, criant avec mes frères dans la grande allée verte de ce jardin sauvage où ont coulé mes premières années, ancien enclos de religieuses que domine de sa tête de plomb le sombre dôme du Val-de-Grâce...

7 octobre 2010

Fumée sur l'eau #1

 
Nous sommes chez les riches, au bords de l'eau. Le long des quais, des gens patrouillent, se baladent, papotent. On y vend des sandwichs aux magrets de canards, on y récupère des sushis périmés. Il y a une pelouse verte et pentue, il y a deux salles et un grand bar. C'est un lieu où des légendes sont venues uriner, râper du fromage ou s'asseoir dans un coin . Les places sont chères. Pourtant nous sommes là. Parce que pour nous, c'est gratuit. Parce que courir dans les champs de vibrations sonores, entourés de contemporains plus sympathiques les uns que les autres, c'est ce que nous désirons pour nourrir nos têtes. Nous sommes les bénévoles oreillistes. Alors allons-y.

John et Billy



Le vieux clown blanc fait son entrée sur scène. Il nous souhaite la bienvenue chez lui. Merci. Il nous y souhaite un bon séjour. J'espère bien. Puis il annonce. Changement de programme. Parce qu'il y a toujours des imprévus, des miracles inattendus. La rousse était indisposée. Alors Funky Claude a appelé ses deux amis. L'un dormait, l'autre était en excursion dans la région. Maintenant, ils sont là. Et c'est peut être le plus beau moment du festival, et c'est déjà, dès le debut. quelque chose d'inoubliable. John McLaughlin & Billy Cobham. Billy Cobham & John McLaughlin. Et il répète encore et encore les deux noms, comme il aime tant le faire. John McLaughlin & Billy Cobham. Cela fait des siècles qu'ils n'ont pas joué ensembles. Billy Cobham & John McLaughlin. Deux solides gaillards, dont les noms sont gravés sur quelques chefs d'œuvres de bibliothèques sonores. L'un gratte, l'autre tape. L'un fait de la prose, l'autre de la peinture. Ou peut-être est-ce de la sculpture aérienne et de la danse ponctuelle. Un peu tout à la fois. Un gros jam. Quelque chose d'insaisissable. Qui ne réfère à aucune émotion interne connue, à aucun préjugé mille fois rabâché. Qui relève d'une force inconnue, et soulève en nous de nouvelles sensations. Parfois c'est un troupeau de mammouths surfant à Hawaï, parfois c'est un poussin jaune qui fait tourner la terre en agitant ses petites pattes. Ça envoie du lourd et ça glisse de légèreté. Ils sourient, ils sont beaux à voir. Et la fête ne fait que commencer...

Beach House
La barbe à papa c'est bon, mais pas dans les oreilles.

Aire d'autoroute


Quand on était gamins, on aimait bien les bonbons. Plus il y avait de sucre, de gélatine de porc, de substance molle chimique, meilleur c'était. Et on mélangeait ça avec du soda noir pétrole, ou orange acidifié. Et on était pleinement satisfait. Maintenant on est grand. Ces choses sans profondeur n'excitent plus suffisamment notre palais. C'est écœurant. C'est gluant et artificiel. Ça ne dépasse pas les gencives, ça ne plonge ni au cœur ni au sexe, ça n'escalade pas jusqu'à la cervelle. Ça ne nous nourri d'aucune façon. Alors peut-être que c'est nous qui sommes diabétique, mais on ne reste qu'une quinzaine de secondes avant de s'enfuir...

Roxy Truc



C'est quand même bien fait. Du bon jus de fruits multi-vitaminé. On ressent un peu la douceur du piano, l'agressivité de la guitare, la velouté du champ, l'arrière goût des choristes et des leurs jolis déhanchements, l'arôme étrange du synthétiseur. Sans aucun grumeaux, une constante fluidité. Mais du coup, on ne sait pas vraiment ce que l'on boit. Si c'est de la poire anglaise ou des oranges américaines, de la laitue française ou des tomates italiennes. Je n'ai jamais trop aimé ses mélanges homogènes qui donne une saveur ne semblant pas très naturelle, où l'on ne se reconnaît jamais. Mais beaucoup de gens aiment, applaudissent les stars. Alors encore une fois, c'est peut-être moi qui suis trop marqué par les ignobles salades de fruits qu'on nous servait à la cantine...


Le Temps Mort


C'est ce qu'on raconte souvent aux jeunes enfants capitalistes. Les plus grandes multi-nationales sont nées dans des garages. On ne fait jamais mention de la musique multi-nationale. Celle qui s'écoute en beaucoup d'endroit, sur beaucoup d'ondes dans beaucoup de casques. Pourtant celles là aussi, parfois naissent dans un garage. De plus, elle a conservé la poésie de l'huile crasseuse, les paysages multicolores à base de suie noire, la proximité du voisinage, la fébrilité d'un bricolage du dimanche. Et puis, quand c'est plusieurs icônes de ce type d'activité là qui s'y mettent, ça ne peut qu'être bien. Ils sont arrivés légèrement planant sur le parking. Ils arrivent dans le même état sur scène. J'aime entendre les rouages gras qui continuent de tourner malgré leur ancienneté, j'aime aussi les petites proses mélodiques le temps que le moteur chauffe, j'aime encore sentir la puissance des mécaniques ronronnantes. Oui, j'aime ça. Et je ne suis pas le seul.

Charlotte


Elle est jolie, elle est belle. Ça, on le savait déjà. Derrière elle, un groupe tout beau tout propre. Elle pioche, dans le légendaire Robert, ou chez ce cher Serge. D'autres noms actuels s'occupent de composer, de mettre en place, d'arranger. Après elle pose ses doigts gracieux sur son tambourin et cela suffit pour satisfaire le public. Une demie berceuse sensuelle, un aperçu d'hymne rock, des néons multicolores en toile de fond. Garnis d'une couche d'effets électro branchés. Un projet d'un moment. Fidèle à lui même. Mademoiselle a envie de chanter. Elle se débrouille pour le faire correctement, bien entourée, moultement inspirée. De la soupe digestive, assez épicée pour faire vibrouiller les sens.

Trucky


La salle n'est pas bien remplie. Pourtant, c'est un grand black, torse nu, musclé, « stylé ». Du rock en fond, parfois agité, parfois planant. Du phrasé par dessus, quelques bribes entre deux son, parfois lui, parfois elle. Pour ma part, je préfère quand il ne se passe pas grand chose. L'espèce de flottement aérien glissant à terre sur des beats lourds. Malheureusement, ce n'est pas fréquent. Elle chante trop, lui se trémousse. Il invite les gens à monter sur scène. Une cinquantaine de personnes le suive. C'est drôle. Ça s'agite. Bordel musical. Des jeunots secouent leur membres, brassent de l'air. C'est l'hymne à l'As de Pique. Alors ça crache. Lui, il fume sa clope. Tranquille. Il a eu raison de faire cela. Je m'allonge. Le sol vibre à cause des grosses bosses. Ça ne creuse pas bien profond, ça passe seulement le râteau. Détend. Applaudis. Reste jusqu'à la dernière seconde, pour voir. Voilà, c'est fini. Je connais quelqu'un qui l'a fréquenté en profondeur. Apparament, il est sympathique.

Vampire Weekend
On dirait Disney. On dirait Tokyo Motel.

Julian



Monsieur est une rockstar. Veste rouge, lunette de soleil. Un fuck à chaque phrase. Nonchalant, maitre du monde. S'en fout. A du bien manger et bien boire. La dame devant moi cri au scandale. Je le trouve parfaitement chié. Tout en décalé comme il faut. C'est un jeu drôle. Il fait croire qu'il ignore l'ordre des chansons. Puis hurle comme un chat éboueur. Crade. Rock. Maitrise complète de la boue. Avec une bière en bouche, c'est parfait. Il fait des blagues. Avant il faisait partie d'une machine, d'un rouage précis. Maintenant, il peut faire l'électron libre. Il descend se faire tripoter par les groupies. Le secu court derrière avec le fil du micro. Des petits larsens, pour assaisonner le ragout. Un son dégueulasse. C'est fantastique. Deuxième fois qu'il part et revient aussitôt. Fout sa merde, comme l'on peut le faire debout, dans la rue, sans s'essuyer. Merveilleux. Je soutiens totalement la démarche.
 
Billy Fucking Idol



Grosse machine, 4 lettres de prises électriques, violet profond, pierre roulante, pistolets de sexe. Pas dirigeable légendaire, Porte ou Qui. Ça balance du cailloux riche en granit, silice, calcaire. Mine de charbon. Pierre du Rhin, ca brille bien mais ca ne vaut rien. En même temps, c'est drôle. Voir des barbares torses nus, grattant, des bides à bières débauchés jouant de la basse. Ça fait trop, c'est exactement l'effet recherché, la lourdeur décadente. Ici, c'est le berceau dans le quel le Rock and Roll a vomi. Un vieux jeune et con vieillissant d'avoir trouvé la maturité. Abus sexuel d'idole. Badge ou pas, on ne paye pas. I feel alright, do feel alright ?

Gary Moore


Elle m'a dit d'aller siffler là haut sur la colline. Bedaine suante. On ira, où tu voudras quand tu voudras. Ce soir, l'été indien. Par le moindre cheveux sur le crâne. Et on s'ennuiera encore, lorsque la mort sera mort. Je n'ai rien compris. Thème de la contée. Tendre élancement. Chute.

Shantel


L'onaniste précédent m'a rendu impuissant. Je reste à quelques pas de la foule, savoure. Le trombone à coulisse, le violon, les guitares, les tambours. Le voyage, la folie de l'est, la noce à l'ancienne. Je m'approche petit à petit. L'onde continue de monter en moi. Mes orteils frétillent. Ça y est, je suis guéri. Maintenant je nage de sueur, de bousculades. Pieds en l'air, bonds sur le côté. Aucune rétention. Parfois, en musique, il suffit de presque rien pour qu'il se passe quelque chose. Pas de corde torturée, de soliste au gros ventre. Mais il se passe quelque chose, ici, comme tous les soirs. Encore faut-il trouver où, être au bon endroit au bon moment. Un festival amène son lot de choix. Un erreur peut-être fatale. Nous continuons. Nous, le public et les fanfarons. Ensemble on s'assoit, puisque le chef le demande. Ensemble, on tape des mains, des talons .Un tambourin est placé sur le devant de la scène. Lors de chaque refrain, des bouteilles d'eau sont versées sur la peau tendue. Une majestueuse frappe provoque des éclaboussures. Incroyablement esthétique et ô combien rafraichissant. Ils quittent la scène une première fois, mais il n'est pas question que cela s'arrête là. La troupe accolée à l'estrade redouble d'agitation. Nouvelle euphorie. Énorme dégagement d'entropie sonore et corporelle. Maintenant, une bouteille de champagne non alcoolisée nous arrose divinement. Nous sommes ivres. J'aurais juré sentir de l'alcool sur mes lèvres. La dernière danse finie, ils accomplissent un beau salut , alignés devant un public allumé. Me voilà rassuré. Les oreilles remontées à bloc, la chemise trempée, les jambes en potage.

Ben Harper



Nouvelle coupe, nouveau groupe. Plus de tam-tam, de chant gospel. Un tentative de faire du rock épuré, avec quelques accents larmoyants et fermiers. La plupart du temps, il est assis, un morceau de fer autour du doigt. Tritouille, tratouille, tratatatouille tritoutatatouille son instrument. Beaucoup de mots, pour peu de ratatouille, au final. Se refaire une jeunesse. Aucune reprise de ses anciennes compositions, mais un briseur de cœur des légendaires dirigeables. Avec le solo de 5 minutes au milieu. Je ne suis pas capable de juger clairement. Les gens qui ont payé ont l'air heureux. Il va jouer longtemps. Communiant avec son public. En prêchant la bonne parole entre ses chansons, ça au moins, ça n'a pas changé.

Ghinzu


Habillés classe. Lunettes de soleil et chemises. Matériel luisant. Club Show. Tout le monde s'active, tape des mandibules. Decidement, ses concerts gratuits abritent les auditeurs les plus libérés. Alors que leur prestation à la capitale il y a quelques temps ressemblait au musée de cire. Les claviers sont aiguisés. On s'amuse bien.

Une fille fait sa gymnastique méditative sur les bords du lac. En fond, la Face Sombre de la Lune des Flamands Roses. C'est beau ...

Massive patraque

Toute l'après-midi, ils ont déchargé le camion. Afin de transporter la logistique encombrante qui se met en fond de scène, pour servir d'arrière plan. Depuis de nombreuses années, le spectacle fonctionne à merveille. Mais ca ne fonctionne pas sur moi. Ça ne fait que me grattouiller. Le flux métaphysique est sans cesse interrompu par les grosses basses, le coup de marteau répétitif. J'ai l'impression qu'on veut m'imposer un rythme de pulsation cardiaque, qu'on me somme de danser comme ceci, de penser à cette vitesse là, de profiter de l'instant présent mais seulement entre les deux "boum" qui me ramènent inévitablement à une lourde réalité. Je me sens enfermé entre deux beats. Comme si la transcendance était fatigante et que parfois, souvent, même dès que possible, il fallait s'asseoir sur son canapé et se coltiner à des miettes, se satisfaire de lambeaux. Ca ne va pas assez loin. C'est comme une perpétuelle redescente après une fabuleuse aventure, seulement on ne nous l'a pas montré cette aventure. Rien à faire, je n'arrive pas à comprendre. Je ne comprends absolument rien à ce charabia.

Paco


L'air d'un vieux sage qui joue devant son petit village. Ou seul au milieu de la foret. L'air humble. Tout est dans le doigté. Même le danseur applaudit alors que la chansons est en route. A moins que cela ne fasse partie de la danse. Une symphonie mystique. Je m'endort.

 
Mama Africa

Je ne suis pas vieux. Je n'ai pas assez vécu de choses. Je ne suis pas encore repus. J'ai faim, j'ai soif. Alors entendre des chants francophones en africain, célébrant le calme après le buffet de la vie, pour mieux la digerer, ca ne me convient pas. Par contre, les deux guignols qui blaguent en jouant du banjo et du tam-tam,  j'apprecie.

Marley

Toujours la même chose. Un copine doit m'enseigner le reggae, comment l'apprécier. On m'a expliqué que dans ce genre de musique, le rythme est toujours le même, c'est la mélodie qui varie. Alors que pour le rock, c'est bien souvent le contraire. En poésie, en littérature, il y a des variations de rythme, entre les lignes, entre deux respirations. Un élan du début à la fin de la pièce. Je ne retrouve pas cela dans cette musique. Ça m'ennuie. Ça ne fait que m'effleurer. Ce n'est pas parce qu'il y a de la fumée partout, que la substance sonore nous prie de sauter en souriant que j'ai envie de le faire. Je ne sais pas. Ça doit venir de mon groupe sanguin, de ma vision du monde. Comme si l'ouverture musicale complète d'une entité qui marche en avant ne peut se faire sans tourner le dos à un certain paysage. C'est dommage.

KJ


K.J.C

C'est le Jazz. Envol, éclaboussure, évidence. Accès improbable à ce qui est impossible. Nous attendons devant la salle. L'entrée nous est interdite. Mille précautions ont été prises pour restreindre notre liberté. Nous sommes assis sur des poufs. Nous attendons. Petit bruit de cymbale, légère caresse de caisse claire. Prélude à la symphonie. Un enchainement d'instant, de notes, qui se suffisent à elles mêmes, qui n'engagent à rien. Doux frottement, latence. C'est le Jazz. Un éclat soudain et la mélodie nait. De nouveaux accords insoupçonnés font leur apparition Le mouvement prend un sens. Des billets pour un autre monde surgissent, entre les doigt d'une main amicale. Ils sont trois, nous sommes trois, du moins, le troisième arrive en courant. Il a quitté son bureau, sans hésitation, mots d'excuses ou permission. La vie lui pardonne volontiers. Je pousse un rire de grand mégalo en grimpant les escaliers quatre à quatre, pour se diriger vers nos places. Lui aussi, lorsqu'il joue, à moitié debout, à moitié dans les cieux, pousse d'étranges cris. Noir. Trois raies de lumières arrivent sur la scène, éclairent les maitres. C'est le Jazz. De la poésie frappée, grattée, qui valse et nous entraine au loin. Le sourire apparait comme une réaction logique, naturelle. Il reste gravé sur nos visages, du début à la fin. L'immanent et le transcendent se mélangent. Toutes ses émotions, sur lesquelles on ne sait mettre de mots, se glissent dans nos oreilles. Il n'y a pas de logique apparente, de rationalisme singulier et précaire. Totalement libre. Ressemble fortement à la vie. La contient et  en dérive. On se prend à rêver que de telles choses existent, et puis tout à coup elles apparaissent  nos yeux. Sous formes de poèmes rythmés, de solution existentielle. Un abruti fait tomber une bouteille plastique. Tous l'auditorium a envie de l'étriper. On comprend pourquoi l'artiste est si compliqué, exigeant  envers les conditions de son accueil. On les comprend et on s'en fout. Quotidiennement, l'humain subit des milliards de restrictions stupides, encombrantes. Accepte de patienter pour un résultat inutile. Alors s'il s'agit de vibration sonores si puissantes, moi je veux bien patienter, m'habiller en noir, ne pas bouger, ne pas parler, faire ce que finalement on m'oblige à faire très souvent. Pour la bonne cause. Pour ressentir l'essence vital. Le IT. Ils quittent la scène. J'applaudis comme une usine à la pointe de la technologie, comme un ouvrier aliéné. Ils reviennent. Un spectateur crie merci. Il parle au nom de tous. Puis ca nous reprend au corps. Ça dépasse la matérialité. C'est beaucoup trop. C'est fini. Le sourire est toujours là. Dehors, les gens regardent la finale du ballon rond. Cela nous parait si fade, inerte, vide. Un but est marqué. Une équipe de onze lavettes gagnent. Mais pour nous, les champions du monde sont un trio. Le plus beau des trio.

Chick

Une incroyable liberté. Ils font ce qu'il veulent, chacun de leur côté ou tous ensemble. L'un fait un solo pendant que l'autre rigole, puis ils rigolent tous ensemble, puis ils jouent tous ensemble. Le long d'une ligne mélodique imaginaire, en nous incitant à rêver pour la saisir. Et cela fonctionne. Et les sons passent d'un monde à l'autre. Simplement heureux d'être là. Simplement miraculeux qu'en déplaçant de la matière on puisse faire vibrer l'air et produire une vie collective. Un concert qui en contient des milliards d'autres, et qui ouvre autant de perspectives internes externes sexuelles spirituelles et sensuelles.

Buddy

Il a un beau béret, une drôle de chemise. Il descend parmi nous, il remonte sur scène, il redescend, il gratte en homo luthier sapiens, il chante en planteur de coton, il nous parle en ami, nous raconte des blagues par ses geste et ses mots. En un éclair il peut reprendre la belle Voodoo de l'afro chaman star. Avec les dents, avec une baguette. Et encore d'autres invincibles chansons apparaissent sous nos oreilles. Je ne sais pas qui a inventé la guitare, mais ça doit être un proche de sa famille. Sans aucun doute.

Anach Cuan
C'est bien de sauter en criant, dansant et buvant du whisky sur de la musique celte.

Vaness
On attend adossé à la barrière, le temps d'une clope. Elle va surement venir pour signer des autographes à ses fans illuminés. La clope est finie. Une prochaine fois peut-être.

On rentre fatigué, on mange des pâtes, on écoute un cd gagné là-bas, pour s'endormir. Et c'est fini. En pause pendant 12 mois...